L'Office national des statistiques vient de publier les grands agrégats de la comptabilité publique pour la dernière décennie. Le détail de l'évolution des indicateurs entrant dans le calcul du produit intérieur brut démontre ainsi une hausse continue de la rémunération globale des salariés, de la consommation finale des ménages ainsi que celle des administrations publiques entre 2000 et 2011.Les données de l'ONS affichent également une évolution du PIB qui s'est accompagnée d'une hausse des capacités de financement de l'Algérie durant cette décade. Le produit intérieur brut est ainsi passé d'un peu plus de 4100 milliards de dinars en 2000 à plus de 14 000 milliards de dinars en 2011 (soit l'équivalent de 190 milliards de dollars), soit une évolution de plus de 350%. Parallèlement, les capacités de financements du pays ont plus que doublé passant de près de 800 milliards de dinars en 2000 à plus 1770 milliards de dinars en 2011. Aussi, le solde de l'épargne nette a évolué de plus de 400% au cours de cette période. Des données qui, dans l'absolu, pourraient refléter l'aisance financière dont jouit l'Algérie. Cependant, selon la lecture de l'économiste M'hamed Hamidouche, les agrégats de la comptabilité nationale publiés en dinars pourraient ne pas donner une image exacte de l'évolution des revenus de l'Algérie durant la dernière décennie, car ne reflétant pas, fluctuation des changes oblige, les variations des revenus en dollars courants et en dollars constants. Autre élément à prendre en compte, selon l'économiste, l'évolution même des indicateurs entrant en ligne de compte dans le calcul du PIB. Outre la prédominance du secteur des hydrocarbures qui a constitué tout au long de la dernière décade plus de 50% de la valeur ajoutée brute. Outre l'agriculture qui contribue aussi largement à la création de valeur ajoutée, c'est le secteur des travaux publics qui a vu sa valeur ajoutée augmenter de manière constante dès 2004 et ceci sous l'impulsion des programmes de dépense publique. Ce qui constitue, selon M. Hamidouche, une vulnérabilité reflétant la dépendance de la création de valeur à la dépense publique. Une dépendance qui apparaît également dans la prépondérance de la consommation finale des administrations publiques dans le PIB. Celle-ci est estimée en 2011 à plus de 3300 milliards de dinars, alors qu'elle n'était que d'à peine 560 milliards de dinars en 2000, ce qui démontre une évolution de 600% au cours de la dernière décennie. Fait d'autant plus inquiétant lorsque l'on sait que la consommation des administrations constitue, sous l'impulsion de la dépense publique, près du tiers du PIB et du revenu national disponible qui y est affectée. L'agrégat de la rémunération des salariés démontre une augmentation de 420% de la somme globale des salaires perçus entre 2000 et 2011. Celle-ci est ainsi passée de près de 890 milliards de dinars à plus de 4500 milliards de dinars. Ceci s'est traduit par une augmentation de la consommation individuelle finale des ménages, laquelle a plus que triplé au cours de la même période. La consommation des ménages et de l'administration publique, qui dépasse aujourd'hui l'épargne nette, a bien entendu alimenté l'évolution des importations lesquelles ont augmenté en valeur et en dinars de plus de 500%. Des chiffres qui démontrent clairement qu'au-delà de l'aisance financière affichée, les agrégats de la comptabilité publique cachent la vulnérabilité structurelle des finances de l'Etat.