Le dialogue pour la résolution de la crise au Nord-Mali, occupé depuis plusieurs mois par des rebelles touareg (le Mouvement national pour la libération de l'Azawad et Ançar Eddine) et des groupes terroristes (Mujao et AQMI), devrait progressivement commencer à prendre forme. Le président burkinabé, Blaise Compaoré, médiateur dans la crise malienne, a reçu, hier à Ouagadougou, une délégation du gouvernement malien pour justement lui soumettre un «agenda de pourparlers» avec Ançar Eddine et le MNLA. Conduite par le ministre malien des Affaires étrangères, Tiéman Coulibaly, celle-ci est composée de quatre personnes. Les délégations de responsables d'Ançar Eddine et du MNLA sont, quant à elles, arrivées dimanche dans la capitale burkinabé. Il s'agira du premier face-à-face entre les trois parties. Comme évoqué plus haut, cette première rencontre tripartite sera consacrée aux questions dites «techniques». Il s'agira, en effet, pour les participants de fixer un agenda des discussions et de s'entendre sur les questions à discuter et la fréquence des réunions, etc. Ce n'est qu'à l'issue d'un certain nombre de rencontres dites exploratoires que commenceront véritablement les négociations. Selon des sources proches du gouvernement burkinabé, le président Campaoré souhaite que le MNLA et Ançar parviennent à se mettre d'accord sur une plateforme commune afin de «fluidifier» les négociations avec la délégation de Bamako. Si ces négociations ont toutes leurs chance d'aboutir, il reste qu'elles seront âpres et difficiles tant le fossé qui sépare les trois acteurs est profond. Ces discussions ne sont par ailleurs pas à l'abri de nombreux parasitages qui pourraient les torpiller. Beaucoup rêvent, en tout cas, de les voir capoter. C'est le cas particulièrement de certaines personnalités à Bamako présentées comme étant proches de Cheikh Modibo Diarra, le chef du gouvernement de transition. Celles-ci refusent tout compromis avec Ançar Eddine et le MNLA. D'autres acteurs régionaux favorables à une intervention militaire au nord du Mali comme le Niger ou la Côte d'Ivoire ne veulent également pas entendre parler de solution politique à la crise. Ces deux pays restent d'ailleurs excessivement critiques à l'encontre du rapport sur le Mali remis dans la nuit de mercredi par Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies au Conseil de sécurité. Ban Ki-moon s'était déclaré, en effet, contre l'option de l'intervention militaire tout en soutenant la nécessité d'une solution politique négociée à la crise. «Je suis tout à fait conscient que si une intervention militaire dans le Nord n'est pas bien conçue et exécutée, elle pourrait aggraver une situation humanitaire déjà extrêmement fragile et entraîner aussi de graves violations des droits de l'homme», a-t-il souligné dans son rapport. «Elle pourrait aussi risquer de ruiner toute chance d'une solution politique négociée à cette crise, qui reste le meilleur espoir d'assurer la stabilité à long terme au Mali», avait encore averti le secrétaire général de l'ONU. M. Ban est allé encore plus loin en écartant la possibilité même que l'ONU finance le projet d'opération militaire de la Cédéao. Bien entendu, il n'en fallait pas plus pour mettre hors d'eux certains pays de la Cédéao. Le Conseil des ministres de l'organisation régionale s'est d'ailleurs empressé de «déplorer» «le déphasage entre les recommandations du rapport (de M. Ban) et l'urgence d'action que nécessite la situation, notamment en ce qui concerne l'autorisation du déploiement d'une Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (Misma)». Et au vu de la réaction pour le moins violente de ses responsables, il est aisé de comprendre que l'ONU a complètement chamboulé les plans de la Cédéao.