Les Américains insistent sur le fait que les djihadistes d'Al Nosra, une émanation d'Al Qaîda en Irak, ne représentent en aucun cas la «volonté du peuple syrien». Le groupe des Amis du peuple syrien rassemble plus d'une centaine de pays arabes et occidentaux, d'organisations internationales ainsi que des représentants de l'opposition syrienne. Les Etats-Unis ont inscrit hier sur leur liste noire antiterroriste le Front Al Nosra, un puissant groupe de djihadistes en Syrie affilié à Al Qaîda, tout en s'apprêtant à reconnaître pleinement la nouvelle coalition de l'opposition syrienne. Washington s'alarmait depuis des mois d'un «détournement de la révolution syrienne» par des islamistes radicaux armés et plaidait dans un même élan pour l'unification et le renforcement de l'opposition, laquelle s'est regroupée il y a un mois sous la bannière d'une «Coalition nationale syrienne des forces de l'opposition et de la révolution». Voulant en quelque sorte trier le bon grain de l'ivraie, le département d'Etat martèle depuis plusieurs jours qu'il faut absolument faire le distingo entre cette Coalition et les extrémistes islamistes – notamment le Front Al Nosra – qui gagnent du terrain dans la guerre civile en Syrie. Les Américains insistent sur le fait que ces djihadistes d'Al Nosra, une émanation d'Al Qaîda en Irak, ne représentent en aucun cas la «volonté du peuple syrien» opposé au régime du président Bachar Al Assad. «La vision violente et sectaire d'Al Nosra est en contradiction avec les aspirations du peuple syrien», a répété hier la porte-parole du département d'Etat Victoria Nuland, ajoutant que «les extrémismes et les idéologies terroristes n'avaient pas leur place dans la Syrie de l'après-Assad». L'inscription par le département d'Etat du Front Al Nosra sur sa liste noire d'«organisation terroriste étrangère» et les sanctions financières du Trésor visent donc un double objectif, selon le gouvernement américain. «Une nouvelle opposition» «Soutenir les aspirations légitimes du peuple syrien qui tente de se libérer de l'oppression du régime d'Al Assad» et «contrecarrer l'entreprise d'Al Qaîda pour subvertir l'opposition syrienne», a expliqué le Trésor. L'inquiétude des Américains se nourrit de ce qui se déroule sur le terrain. Le Front Al Nosra, inconnu avant le début de la révolte syrienne en mars 2011, est désormais présent sur la quasi-totalité des fronts. Il a revendiqué la plupart des attentats-suicide perpétrés dans plusieurs régions syriennes, en particulier à Damas. Ce classement «terroriste» et ces sanctions contre Al Nosra doivent s'accompagner d'une très probable pleine reconnaissance politique au cours de la réunion internationale des Amis de la Syrie aujourd'hui à Marrakech (Maroc). Un rendez-vous que la secrétaire d'Etat Hillary Clinton, souffrante, va toutefois manquer. «Les Etats-Unis et d'autres Amis de la Syrie reconnaissent depuis longtemps le droit du peuple syrien à l'auto-défense, le droit de se défendre contre la brutalité du régime d'Al Assad. Mais admettre ce droit à l'auto-défense ne justifie pas l'extrémisme», a expliqué un diplomate américain. Le groupe des Amis du peuple syrien rassemble plus d'une centaine de pays arabes et occidentaux, d'organisations internationales ainsi que des représentants de l'opposition syrienne. La réunion de Marrakech sera sa 4e au niveau ministériel, la première depuis celle de Paris en juillet. Des responsables américains laissaient entendre ces derniers jours que leur administration profitera de la tribune de Marrakech pour légitimer la Coalition comme «la seule représentante du peuple syrien» et non plus seulement «une représentante légitime». La France et le Royaume-Uni ont déjà franchi le pas. «Maintenant qu'une nouvelle opposition s'est formée, nous allons faire ce que nous pouvons pour la soutenir», avait déjà dit la semaine dernière à Bruxelles Mme Clinton, qui sera représentée au Maroc par son adjoint William Burns.Pour l'instant, Washington s'en tient à une assistance humanitaire de 200 millions de dollars et à l'acheminement d'une aide «non létale» aux rebelles, excluant officiellement toute livraison d'armes.