Un jour, je croisai un ami qui me racontait une anecdote dans laquelle il avait été «super content» de rencontrer Ben Boulaïd ! Ce qui était fascinant dans cette histoire, c'est qu'à aucun moment, mon pote prononça le nom du comédien. «Non pas Hassen Kechache, Ben Boulaïd !», me baratinait sans cesse le lascar. C'est sympa et en même temps bizarre. Ce cas de figure est communément rapporté comme un phénomène de «starisation» (ou starification, à vous de (re)voir), et l'Algérie, quoi qu'on en pense, en regorge comme n'importe quel pays. Penchez-vous deux secondes sur la TV ou la radio, observez de quelle manière le public fennec s'aventure dans l'intimité d'un type tel que Salah Aougrout, plus connu sous le sobriquet «Souilah», (re)lisez les commentaires sur le compte facebook d'un Mahrez Rabia, animateur de la Chaîne 3, ou bien, en matière de cinoche, observez de loin et attentivement les accolades, photographies et autres poses amicales autour du comédien Hichem Mesbah dans une quelconque ruelle algéroise. Une star en Algérie, c'est le voisin d'en face, celui qu'on vient déranger pour du pain, des œufs et parfois de l'insecticide. En France, jamais un cafetier irait jusqu'à jurer sur sa propre mère que la star face à lui ne paiera pas son café de son vivant. Jamais ! Ici, ça arrive, et c'est monnaie courante. Ces voisins de luxe proviennent rarement du cinéma, surtout de la TV. Média par excellence dans ce pays aux 40 millions d'habitants. Le cinéma ne fait pas de recette, la faute à une industrie inexistante. Mais allons plus loin dans ce rapport de cause à effet et imaginons le milieu de l'acting, le vrai, se réapproprier les grandes figures historiques. Aujourd'hui, dans la peau de Ali la Pointe, j'y verrais Nabil Asli, Hassiba Ben Bouali serait interprétée par Samia Meziane, Amine Menteser dans le rôle de Hocine Aït Ahmed, Khaled Benaïssa camperait le personnage «torturé» de Larbi Ben M'hidi, Rym Takoucht endosserait les habits de Zohra Drif, Samir El Hakim dans celui de l'Emir Abdelkader, Adila Bendimerad dans celui de Djamila Bouhired et Kader Fares Affak en Houari Boumediène, un rôle à contre-emploi, et qui surprendrait finalement tout ce joli monde, toute cette belle famille étoilée. Sérieusement, il nous faut plus de stars de cinéma dans ce pays. Et le cinéma devrait se bouger un peu. On s'ennuie tellement !