Si le remaniement ministériel en Tunisie est sur toutes les lèvres depuis juillet dernier, les positions divergentes des partis politiques, y compris au sein de la troïka, n'augurent rien de bon quant aux chances d'élargissement de l'équipe gouvernante. Tunisie De notre correspondant La dernière réunion, jeudi soir, entre les trois partis de la troïka gouvernante (Ennahda, Ettakattol et le CPR) n'a fait que constater le blocage. Alors qu'Ennahda veut préserver sa mainmise sur les ministères de souveraineté et limiter le changement aux ministères techniques, le CPR cherche plutôt un choc à travers ce remaniement. Son secrétaire général, Mohamed Abbou, parle de «réduction chirurgicale du nombre de ministères et d'un signal fort contre la corruption». Abbou a menacé de quitter la troïka si ses conditions ne sont pas prises en considération. Quant à Ettakattol, le troisième pilier au pouvoir, il soutient timidement le CPR. Mais, décimé pour avoir perdu huit de ses vingt membres à l'Assemblée, Ettakattol ne peut élever la voix. Par ailleurs, les analystes reprochent à la troïka gouvernante un déficit en matière de bilan. «Il n'est pas normal que l'on entreprenne un remaniement ministériel sans discuter du programme des réformes politiques devant l'accompagner», remarque le politologue Hamadi Redissi. L'islamologue Néji Jalloul reproche au gouvernement l'absence de tout sens d'évaluation. «Faute de diagnostic précis des anomalies, les thérapies ne sont pas disponibles», regrette-t-il. Tractations La conviction s'impose, maintenant que les divergences l'emportent sur les concordances entre les protagonistes politiques, comme l'avaient prédit les observateurs. La troïka ne pouvait d'ailleurs s'attendre à un accueil favorable de la part de l'opposition dans la mesure où elle n'a pas fait d'autocritique et n'a pas, non plus, annoncé de feuille de route pour les principales échéances. Il y a toutefois du nouveau vu que les critiques fusent de toutes parts, y compris au sein de la troïka, surtout avec les menaces du CPR de quitter la barque, ce qui risque d'affaiblir la majorité gouvernante qui est actuellement de 117 membres sur les 217 de l'Assemblée. Ainsi, des exigences sont venues de toutes parts pour changer le profil du gouvernement. Mais le conseil de la choura d'Ennahda, réuni le week-end dernier, a fait la sourde oreille à toute tentative de changement dans les orientations ; il a réitéré son accord avec la politique du gouvernement et réaffirmé l'attachement d'Ennahda aux ministères régaliens. Ennahda a fermé la porte à tout changement en dépit des multiples rencontres récemment tenues avec les divers groupes politiques, notamment avec le leader du parti républicain, Néjib Chebbi.