Contrairement aux prévisions de nombreux experts qui tablent sur une guerre longue au Mali, le chef d'état-major de l'armée malienne, le général Ibrahima Dahirou Dembélé, prévoit une «libération totale» des régions du nord du Mali des groupes terroristes dans un délai «d'un mois». «Notre objectif est la libération totale des régions du nord du Mali. Si les appuis sont conséquents, cela ne dépassera pas plus d'un mois pour Gao et Tombouctou», a déclaré le général Dembélé à la Radio France internationale (RFI). Gao (1200 km de la capitale malienne Bamako) et Tombouctou (900 km de la capitale) sont deux des principales villes de la vaste région du Nord malien que les groupes armés affiliés au réseau terroriste d'Al Qaîda contrôlent depuis plus de neuf mois. Ragaillardie par la reprise de Konna, de Diabali et de Douentza, l'armée malienne, soutenue par des troupes françaises, a, en tout cas, poursuivi hier à bonne cadence sa progression en direction du nord. Dans le but évident d'accélérer l'issue de cette guerre, les troupes spéciales françaises se sont, quant à elles, attaquées directement à Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) en visant notamment un de ses centres de commandement près de Tombouctou. Ne souhaitant visiblement pas trop communiquer sur l'opération, le colonel Thierry Burkhard, porte-parole de l'état-major des armées françaises, s'était borné hier à confirmer des frappes aériennes françaises «à la périphérie» de Tombouctou. Les Français ont visé «un centre de commandement des terroristes», a-t-il précisé, sans parler d'AQMI. Selon une source proche du gouvernement citée par la presse française, AQMI a été délibérément visé lors de cette attaque. Ce groupe est, rappelle Paris, le plus virulent contre les intérêts français et depuis 2006 il désigne la France comme son ennemi principal. 340 millions d'euros pour faire tourner la Misma Les succès remportés jusque-là par l'armée française sur le terrain ont visiblement convaincu certains pays «alliés» de prêter main-forte à Bamako. Les Américains ont ainsi été ainsi les premiers à répondre favorablement aux demandes d'aide logistique et financière de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour le déploiement de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma). Cette force sera, à terme, composée de quelque 6000 soldats africains. L'armée américaine a commencé d'ailleurs, dès lundi, à transporter des troupes et de l'équipement français vers le Mali pour soutenir son offensive contre les rebelles islamistes, a indiqué, hier, le Commandement des forces armées américaines en Afrique (Africom). Le seul problème – et non des moindres – qui reste à résoudre autant pour Paris que pour la Cédéao consiste, bien évidemment, à trouver les fonds nécessaires pour financer la Misma. A ce propos, le ministère français des Affaires étrangères a estimé les besoins financiers pour former l'armée malienne et déployer les troupes africaines au Mali à 340 millions d'euros. «On estime les besoins pour les forces armées maliennes autour de 120 millions d'euros et pour la Mission internationale de soutien au Mali (Misma) de l'ordre de 220 millions d'euros en année pleine», a déclaré, hier, Philippe Lalliot, porte-parole du Quai d'Orsay, lors d'un point de presse. Il a notamment souligné qu'il fallait tenir compte de l'augmentation des troupes de la Misma, initialement prévue à hauteur de 3300 hommes, et qui devrait en comprendre à terme plus de 5000. Une réunion des donateurs se tiendra, rappelle-t-on, le 29 janvier à Addis-Abeba, au lendemain d'un sommet de l'Union africaine (UA). «Cette réunion est très importante. Elle porte notamment sur comment on utilise et comment on approvisionne les deux fonds qui ont été créés – ou sont en passe de l'être – d'une part pour les forces armées maliennes et d'autre part pour la Misma», a affirmé le porte-parole du Quai d'Orsay. «La mobilisation internationale (pour le Mali) doit porter sur la mise à disposition de troupes et de moyens logistiques et elle doit aussi s'exprimer sur le volet financier qui est l'objet de cette réunion d'Addis-Abeba», a dit M. Lalliot. L'effort de recomposition, de restructuration et de formation des forces armées maliennes d'une part, et d'autre part, de déploiement de la force africaine décidée par la résolution 2085 de l'ONU, «doit être soutenu dans la durée», a-t-il ajouté. Est-ce à dire que contrairement au général Ibrahima Dahirou Dembélé, les Français sont persuadés que la guerre contre le terrorisme au Sahel sera âpre et nécessitera du souffle et beaucoup de moyens ?