Robes griffées, boucles d'oreilles fantaisie, dernier mascara high-tech… Pas facile de rester à la mode quand on habite à Alger ? Si, si. Surtout depuis que la vente directe de marchandise d'Europe et des Etats-Unis se pratique via facebook. Evidemment, chez nous, au pays du système D, le phénomène est en plein boom. «Je n'achète aucun vêtement en magasin depuis que j'ai découvert cette superbe astuce ! Non seulement je gagne du temps, mais aussi j'en ai pour mon argent.» Malika, la trentaine, plus leggings et jupe courte que tunique, travaille dans l'administration depuis quelques années et n'a pas le temps de faire ses courses dans la capitale. «Ce que je perds dans les embouteillages et les tracas pour trouver où se garer, je le gagne en temps et argent, d'un simple clic», s'enthousiasme-t-elle. Son secret ? Malika a opté pour le shopping online. Mais comment faire des achats, puisqu'en Algérie on ne dispose pas encore de payement sécurisé sur le web ? La solution, c'est facebook ! Des centaines de boutiques en ligne prolifèrent et les vendeuses se disputent un vrai marché. «Je me suis lancée dans la vente en ligne il y a trois ans, affirme Naziha, 35 ans. J'ai emménagé à Londres avec mon mari, diplômée en géologie, mais je n'ai pas réussi à trouver de poste dans mon secteur. Lors des réunions avec la communauté algérienne, des amis m'ont montré comment faire du commerce sans passer par des procédures administratives qui coûteraient les yeux de la tête !» Naziha a ainsi réussi à monter une mini-entreprise de vente exclusivement pour l'Algérie. «J'ai ouvert un compte sur le site communautaire facebook, puis j'ai ajouté des photos d'articles susceptibles de plaire aux Algériennes : du maquillage, des accessoires fantaisie, etc. Il suffit qu'elles réservent sur la photo en ajoutant un commentaire. Au bout d'une vingtaine de réservations, je prépare les colis pour les envoyer en l'Algérie.» Eviter les soucis de la douane est chose facile pour Nour. Vendeuse depuis un an sur le web, installée à Paris, elle a trouvé le moyen de ne pas attirer l'attention sur ce qu'elle fait parvenir à ses clientes. «Je suis chineuse professionnelle, s'amuse-t-elle à dire. Je me fournis uniquement dans les vide-dressings parisiens. Mes clientes sont excessivement exigeantes et veulent de la marque. Pour éviter la saisie de la douane algérienne, j'expédie des produits sans emballage et sans étiquette, et ça marche !» Vide-dressing Le vide-dressing via facebook est une tendance qui fait craquer les Algériennes. «On se sert directement dans le dressing de la petite Anglaise aux jupes droites rétro, aux chaussures colorées, ou chez la Française avec ses robes originales avec leur détail qui tue !» affirme Kahina, une acheteuse qui se déclare «compulsive». «Pour moi, acheter dans les vide-dressings à travers le Net, c'est m'offrir tout ce que je veux sans faire attention à la dépense. Pour un blazer Chanel et un sac Lancel, je n'ai dépensé que 2700 DA !» Le témoignage de Kahina prouve que les vendeuses virtuelles ont trouvé le bon filon. Comment s'offrir une marque à bas prix ? Nour, la vendeuse parisienne, explique : «Il faut d'abord assister à toutes les ventes privées, avoir accès à ce petit univers et ne pas avoir peur d'aller dans les magasins de revente. Souvent les articles sont vintage, mais c'est ce qui plaît. La deuxième étape est d'être fidèle aux goûts de mes clientes, de ce fait, choisir des vêtements et des accessoires distingués et surtout de marque, car toutes les femmes raffolent des marques ! Enfin, le fait d'acheter un lot de robes ou de chaussures me fait gagner beaucoup plus d'argent que si j'achetais un article à la fois. Par exemple un lot de dix robes ou tailleurs de marque peut aller de 25 à 40 euros, conclut-elle. Je les revends à 3500 DA l'article. La cliente comme moi faisons des bénéfices !» Pour le paiement, vous avez le choix : soit vous payez lors de la livraison à la personne qui vous remet la marchandise, soit vous payez par virement en envoyant 50% de la somme sur le compte (en Algérie) de la vendeuse, et à la livraison, vous payez les 50% restants. Pour le délai, comptez entre une semaine et vingt jours. Tout le monde s'y met Aujourd'hui, des sociétés étrangères implantées en Algérie recourent également aux réseaux sociaux pour diffuser leurs infos et faire de la vente en ligne. «Le gros problème en Algérie est qu'on ne peut pas acheter sur le net, il a fallu donc trouver une alternative pour avancer avec son temps», explique Anis Ferdjioui, superviseur dans une multinationale spécialisée dans le cosmétique bio. «Pour la diffusion de nos produits, j'ai recruté des vendeurs et vendeuses à travers facebook. Ils prennent les commandes des clients via la messagerie et livrent en moins de 24 heures. Le client est satisfait et les affaires sont plus fructueuses que d'investir dans un site et gérer les commandes.» Pour Salah, ancien directeur d'un atelier de fabrication de chaussures, facebook «ouvre des possibilités infinies d'échange de compétences et aussi de commercialisation de produits qu'on ne trouve pas sur le marché, puisque nous avons l'avantage de donner plus de choix aux clients. Je me suis convertie dans la parfumerie raffinée. Avec la contrefaçon, certaines grandes marques de luxe engagent discrètement dans des pays comme l'Algérie des distributeurs et vendeurs pour rester sur le marché. Ces entreprises du luxe préfèrent sacrifier 15 euros sur un parfum que de perdre le marché. Franchise ou pas, elles sont décidés à faire délier les bourses des Algériens.»