La rencontre « musicale » entre un virtuose du piano et un maître du malouf a donné lieu à un spectacle original, d'une rare qualité. Quand un improvisateur, virtuose du piano, rencontre un cheikh du malouf pour un dialogue musical, cela donne inévitablement un concert d'une originalité indéniable. C'est ce que l'institut culturel français a réussi à faire en proposant une initiative inédite, lors d'un concert mémorable abrité, jeudi dernier, par une salle pleine de monde, et animé par Jean-François Zygel et Salim Fergani. Le premier, professeur d'écriture et d'improvisation au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, passe pour être l'un des maîtres de l'improvisation musicale. «Un art» dans lequel il excelle. Ce qui lui a valu de nombreuses distinctions. Le second, digne héritier de son père, le grand cheikh du malouf, Mohamed-Tahar Fergani, après une longue carrière riche et fulgurante, n'est plus à présenter. «Comme le piano est le luth (oûd) des Européens et que celui-ci est le piano des musiciens arabes, nous allons faire dialoguer les deux instruments ensemble ; je ne sais pas ce que cela va donner», dira Jean-François Zygel en guise de présentation du spectacle. Ce dernier est né d'une rencontre entre les deux artistes qui décident de lancer une expérience musicale. Une idée qui semble avoir emballé Salim Fergani. L'enthousiasme des deux artistes était bien apparent. Sur scène, la complicité était quasi parfaite. Sur son «oûd», le cheikh du malouf choisit le mode pour lancer les débats. Un choix improvisé du répertoire du malouf. En face, Jean-François Zygel écoute, s'inspire, arrange ses notes et donne la réplique. Un commentaire musical fait d'une alchimie séduisante de sonorités, un dialogue tendre et plein de créativité. Durant tout le spectacle, l'assistance est curieuse et attentive au moindre mot, au moindre geste et au moindre mouvement, face à un duo maîtrisant parfaitement son art et aussi son sujet. Comme «la musique est universelle», comme il aime à le répéter, Salim Fergani donnera à son tour libre cours à son inspiration, jusqu'à chanter un hymne à l'amour et à la beauté, en cette journée dédiée aux femmes. On avait l'impression que l'oûd de Salim et le piano de Jean-François se connaissaient depuis des lustres. Ce spectacle si beau et si captivant s'est hélas achevé trop rapidement, face à un public émerveillé et inassouvi.