Mises en place pour représenter l'Etat dans sa mission de régulateur du marché suite à l'ouverture de plusieurs secteurs d'activité à la concurrence, les autorités de régulation en Algérie font face, malgré leur jeune âge, à des contraintes liées notamment à leur indépendance et à leur autonomie vis-à-vis de l'exécutif. La question a été soulevée, hier, lors de la journée d'information sur les autorités de régulation du secteur de l'énergie et des mines organisée à l'hôtel El Aurassi. Officiellement autonomes et indépendantes, les autorités de régulation algérienne, si l'on se fie aux analyses présentées par certains experts nationaux, sont loin de l'être. C'est le cas notamment pour M. Belmihoub, professeur de gestion publique à l'ENA et chercheur associé au CREAD, qui a présenté une communication sur « Les autorités de régulation et le rôle de l'Etat ». D'après ce dernier, le cas de l'Algérie dans le domaine du contrôle des institutions de régulation est encore plus complexe dans le sens où le pouvoir exécutif continue à régenter les institutions de régulation et à refuser le partage du pouvoir avec les autres instances institutionnelles : législatif, judiciaire, le politique et les autres sphères comme le mouvement associatif, les institutions de consultation (CNES, associations professionnelles, associations des usagers du service public), etc. Ainsi, souligne le chercheur, « les premières autorités de régulation sectorielles créées depuis 2000 restent dominées par le pouvoir exécutif à la fois en définissant des statuts réducteurs de l'autonomie et en se réservant les droits de nomination des membres de collèges et des directoires ». Plus explicite, l'analyse des règles relatives aux modalités d'élaboration des règlements intérieurs, indique M. Belmihoub « ne révèle le degré d'indépendance des autorités de régulation que lorsque leurs membres exercent leur fonction dans le cadre d'un mandat qui leur garantit une indépendance certaine ; or le statut des membres des autorités de régulation en droit algérien est loin de remplir cette condition, ce qui, du point de vue de la recherche de l'indépendance, a tout intérêt au fait que certaines autorités élaborent, elles-mêmes, leur propre règlement intérieur ». Au plan financier, le législateur, fait savoir le conférencier, a reconnu l'autonomie financière, notamment au conseil de la concurrence, à l'autorité de régulation des postes et des télécommunications et à la commission de régulation de l'électricité et du gaz. Néanmoins, nuance-t-il, « ce premier signe d'indépendance des autorités de régulation n'a de portée que si ces dernières sont à même de générer leurs propres ressources ; or, l'origine de leurs ressources financières témoignent à l'évidence que cet aspect de l'indépendance est loin d'être consacré entièrement ». En effet, ajoute le professeur : « Il ressort de la lecture des textes instituant ces autorités que la COSOB, l'autorité de régulation des postes et des télécommunications, de la commission de régulation de l'électricité et du gaz, de l'agence nationale du patrimoine minier et de l'agence nationale de la géologie et du contrôle minier disposent de ressources qui proviennent, selon l'ordre présenté dans leurs textes institutifs, de leurs activités et, dans une certaine mesure, de subvention de l'Etat. » Cependant, relève-t-il, « si l'origine des ressources de ces autorités de régulation semble aller dans le sens d'une certaine indépendance fonctionnelle, la fixation de ces ressources par voie réglementaire remet en cause cette tendance - les moyens financiers du Conseil de la monnaie et du crédit ainsi que la commission bancaire sont supportés par le budget de la Banque d'Algérie - le conseil de la concurrence dispose de moyens qui sont à la charge de l'Etat. Ainsi, les données sur les aspects liés aux moyens financiers indiquent que les autorités de régulation ne disposent pas d'une réelle autonomie financière dans la mesure où l'administration centrale détient les cordons de la bourse ».