L'archéologue Jean-Pierre Laporte a démontré dans sa conférence, que les rites funéraires libyques n'ont pas disparu des monuments sous les influences méditerranéennes gréco-punique et romaine. Un projet maghrébin pour le classement de tous les mausolées d'Afrique du nord patrimoine universel, est en cours de concrétisation. C'est ce que nous avons appris de Mme Sabah Ferdi, maître de recherche au centre national de la recherche algérien (CNRA), subséquemment à la conférence livrée jeudi par l'archéologue Jean-Pierre Laporte au musée national Cirta sur les «Grands mausolées maures et numides d'Afrique du Nord». S'appuyant sur des études très approfondies menées sur les différents monuments funéraires dispersés à travers le Maghreb, depuis le Maroc à la Libye, au moyen de méthodes modernes, -l'exploitation archéologique de vues satellitaires, entre autres-, le conférencier a démontré que les traditions funéraires libyques (forme antique de berbère) n'ont pas disparu sous les influences méditerranéennes gréco-puniques et jusqu'à la période romaine, dans les royaumes berbères, où des traces de rites libyques sont perceptibles, comme par exemple l'incubation, -qui consiste à dormir auprès de l'ancêtre mort pour s'inspirer de sa sagesse-, ou encore la présence d'autels à sacrifices… De nouvelles thèses ont émergé de ces études qui ont permis une connaissance plus large des peuples préhistoriques nord-africains par rapport aux formes mêmes de leurs mausolées tels les Djeddars de Frenda (Algérie), au nombre de quinze identifiés par les lettres de l'alphabet de A à O, dont le soubassement est carré et l'élévation pyramidale, le gigantesque M'Zora, de type Bazina (circulaire) au nord-ouest du Maroc, qui serait selon la légende, la tombe du géant d'Antée (fils de Neptune et de la Terre, après qu'Hercule l'eut vaincu et tué), ou encore de Henchir Bourgou, sur l'île de Djerba, en Tunisie. «Les archéologues du XIXe siècle firent un travail remarquable en dépit des moyens rudimentaires ; leurs travaux nous ont beaucoup aidés, mais il y a encore une insuffisance globale de nos connaissances; les sites endommagés, ou saccagés demandent aujourd'hui pour leur restitution des équipes pluridisciplinaires : archéologues, géologues, architectes, historiens de l'art et ethnologues, en plus des laboratoires», relève le conférencier, qui, par ailleurs, publiera prochainement un ouvrage englobant tous ses travaux de réévaluation de découvertes anciennes. Concernant le Mausolée d'El Khroub (dit Tombeau de Massinissa), le communicant note que sa restauration, récente, comporte beaucoup d'erreurs, et qu'une équipe pluridisciplinaire s'impose avec un cahier des charges pour sa restitution. «Il y a deux spécialistes maghrébins de renommée mondiale, Azzeddine Benchaouli et Mounir Rouchtaki, il faut les laisser travailler avec les éléments de leur choix», a-t-il suggéré. Donc, beaucoup reste à faire en matière de protection du patrimoine archéologique, spécialement en Algérie où la plupart des sites sont livrés au vandalisme en l'absence de gardiennage de nuit, comme, entre autres, celui de Massinissa dont les équipements d'accompagnement ont été proprement dévastés, ou encore Tiddis l'oubliée, pour ne citer que ceux-là.