Le Mois du patrimoine revient comme chaque année, célébrant la mémoire collective que représentent les biens culturels matériels et immatériels que l'histoire a légués à la postérité. Des festivités sont organisées çà et là, l'espace d'un temps, et puis plus rien. On met en place des tables rondes, on invite des spécialistes pour animer des conférences sur la question, on organise des expositions et on fait le plus souvent dans des redondances autour de la valorisation de l'ensemble des biens hérités de ceux qui nous ont précédés. Que de sites historiques pillés, détériorés, voire réappropriés grâce à des accointances pour ériger des « intérêts ». Que de monuments restent livrés à l'usure du temps. Que de ksour abandonnés à leur sort. Que de palais et forts en décrépitude attendent qu'ils soient sauvés. Que de pièces muséales et autres fresques de mosaïque ont été subtilisées par des mains « habiles ». Et passe des sites non encore inventoriées sous un sol qui regorge d'un trésor plusieurs fois millénaire. Des vestiges datant de la Préhistoire jusqu'aux strates de l'époque ottomane en passant les périodes numide, punique, phénicienne et romaine, le nombre de sites et monuments avoisine les 2000. Un fonds archéologique dont à peine un quart a été défriché et classé patrimoine national. Cet héritage qui a traversé les âges dans le Bassin méditerranéen et dans les confins de notre Grand Sud est supposé constitué un viatique pour le XXIe siècle pour les esprits avisés. Quand bien même le dispositif juridique en la matière a été renforcé par les termes de la loi 98-04, celui-ci contraste avec l'épreuve du terrain. Les mesures de protection, de sauvegarde, de restauration et de mise en valeur sont loin de restituer la dimension vivante d'un patrimoine que nous envient nombre de pays. Un état des lieux qui nous renseigne que l'autorité archéologique - qui vient de se redéployer - est loin de constituer une force en comparaison avec des pays voisins. Dans la foulée, il y a lieu de citer le talon d'Achille de nos restaurateurs qui se résume dans la maîtrise d'œuvre portant sur la réhabilitation des biens culturels immobiliers protégés. Si les travaux au niveau de la citadelle font du surplace, une virée dans certaines maisons en cours de restauration dans la vieille médina d'Ibn Mezghenna nous édifie sur la qualité des travaux et la nature des matériaux qui choquent. Quant aux palais restaurés et livrés, l'on s'interroge s'ils seront capitalisés. Ou carrément fermés.