Après avoir été catégoriquement écartée, l'idée de la création d'une organisation dans laquelle seront représentés les pays exportateurs de gaz semble de plus en plus à l'ordre du jour. Le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, avait exclu une telle option arguant du fait que le marché gazier soit différent du marché pétrolier, notamment en matière d'investissements. Il estimait qu'il n'y avait pas lieu de mettre en place ce qui s'apparenterait à une OPEP du gaz. Mais le rapprochement entre la compagnie nationale Sonatrach et le géant russe Gazprom pourrait changer la donne. D'autant plus que ces deux fleurons du marché gazier mondial ont convenu récemment de signer un protocole de coopération dans les plus brefs délais. Le journal londonien, le Times, cité par l'agence officielle APS, laisse penser dans son édition de lundi dernier qu'une telle démarche pourrait naître suite aux développements importants enregistrés sur le marché gazier, notamment en Europe et en Amérique du Nord. La crise entre la Russie et l'Ukraine a vraisemblablement joué le rôle de catalyseur dans le lancement d'une telle réflexion. Le Times rappelle que les détracteurs de la création d'une organisation regroupant les pays producteurs de gaz se sont toujours appuyés sur l'argument selon lequel « le marché du gaz est un marché local tributaire de la réalisation de gazoducs et des contrats à long terme entre producteurs et consommateurs ». En somme, il ne saurait dépendre d'un groupe de pression qui serait à même d'influencer les cours du gaz. L'augmentation des échanges de cargaisons de gaz à l'aide de méthaniers a créé une concurrence sur les prix entre l'Europe et l'Amérique du Nord, de telle sorte que les pays exportateurs se retrouvent dans une position qui leur permet de projeter de s'organiser en conséquence. Le Times estime que Sonatrach et Gazprom qui occupent les premières places sur le marché émergent du gaz liquéfié pourraient y jouer un grand rôle. Elles ont en tout cas les atouts pour peser sur l'échiquier. Investissements L'Algérie est le deuxième exportateur de gaz vers l'Europe et occupe une place de choix en matière de commercialisation de gaz. Cela est dû, notamment, au fait que l'Algérie est depuis les années 1970 un exportateur traditionnel de gaz liquéfié vers l'Amérique. Elle est aussi depuis les années 1960 une pionnière dans la technique du refroidissement du gaz à -160 degrés. L'Algérie est également le deuxième plus grand exportateur de gaz naturel vers l'Europe après la Russie. S'agissant des réserves de gaz, elle occupe le huitième rang mondial avec 4,5 trillions de mètres cubes qui sont appelés à s'élever à 8 trillions de mètres cubes à la faveur des nouvelles prospections dans le grand Sahara. La position de l'Algérie sur le marché gazier international est confortée par son volume de production qui la place au quatrième rang ainsi que par sa position géographique stratégique. Des investissements lourds ont été réalisés pour arriver à cette position. Il en est ainsi de la jonction avec le sud de l'Europe par le biais du gazoduc Transmed qui la relie au sud de l'Italie et par le gazoduc traversant la péninsule ibérique (Espagne et Portugal) via le détroit de Gibraltar. Il est également prévu la réalisation d'un troisième gazoduc reliant directement l'Algérie au littoral espagnol dans l'objectif d'augmenter les capacités d'exportations gazières vers l'Europe. La politique énergétique européenne ne saurait se passer des importations de gaz en provenance de Russie, d'Algérie et de Norvège. Ses derniers ont déjà eu à se montrer en rangs serrés au moment où l'Europe avait promulgué la directive gaz qui prévoit la libéralisation du marché gazier européen, estimant que cette nouvelle réglementation touchait leurs intérêts communs. La mise en place d'une organisation qui réunira les pays exportateurs de gaz reste toutefois au stade de conjecture.