Rachida Brakni triomphe dans Cheba Louisa. Semaine après semaine, un certain nombre de films sont sur les écrans français revus et corrigés aux couleurs de la France métissée et multiculturelle. Après La cité rose, c'était, le 1er mai, au tour de Mohamed Dubois d'Ernesto Ona, avec Eric Judor (sans Ramzy) dans le rôle d'un fils de banquier au faciès maghrébin, et qui, en quête d'identité, va se plonger dans l'univers des banlieues. Le tout constitue une comédie à la fois bien écrite, intelligente et souvent drôle dans laquelle Sabrina Ouazani (découverte en 2004 par Abdelatif Kechiche dans L'esquive), confirme un talent qui n'a rien à envier à ses consœurs Leïla Bekhti et Hafsia Herzi. Le public ne s'y est pas trompé en faisant de Mohamed Dubois un succès (plus de 50 000 entrées le premier jour !). Dans la foulée, sort une autre comédie sur «le vivre ensemble» aux accents humanistes de bon aloi dans une période où le Front national stigmatise plus que jamais l'immigration maghrébine et les enfants qui en sont issus. Cheba Louisa, signé Françoise Charpiat et co-écrit par Mariem Hamidat, tord le cou aux sempiternels clichés sur les banlieues, en mettant en scène une amitié improbable entre Djamila (Rachida Brakni), juriste de 30 ans, aussi intégrée que peut être désintégrée socialement et sa voisine de palier, Emma (Isabelle Carré), caissière en grande surface et mère séparée de deux enfants, qui peine à joindre les deux bouts. Ce qui va les réunir, c'est l'amour de la musique raï et chaâbi que Djamila fait découvrir à Emma à travers le portrait de Cheba Louisa, grand-mère de la juriste. Ce qui, au passage, est un hommage judicieux à la liberté de ces cheikhates qui ont bravé l'interdit en chantant le sexe ou l'alcool. Au long des péripéties à rebondissements du récit, apparaît une galerie de portraits avec, en tête, Zohra, mère de Djamila, incarnée par une Biyouna au mieux de sa forme (comme pour son rôle dans Mohamed Dubois) en Mama maghrébine protectrice et étouffante par la somme de ses préjugés. En particulier pour le fiancé gaulois de Djamila, prêt à tout, y compris la circoncision, pour épouser sa belle. Sid Ahmed Agoumi est égal à lui-même dans le personnage du père, au même titre que Baya Belal dans celui de la tante. Et ce mois de mai sera bien celui de Rachida Brakni, puisque le 17 mai, elle sera sur France 2 dans un téléfilm, Silences d'Etat, où elle incarne la chargée de communication du président de la République, joué par Richard Berry. Et, last but the least, elle sortira un nouvel album à la rentrée de septembre-octobre. Artiste accomplie aux talents multiples de comédienne et de chanteuse, elle interprète d'ailleurs elle-même toutes les chansons de Cheba Louisa.