Bientôt 45 jours et le peuple algérien demeure sans nouvelle du président de la République. Depuis son hospitalisation, le 27 avril denier, en France, hormis deux ou trois communiqués laconiques de la présidence de la République et quelques rumeurs, le flou règne sur l'état de santé réel de Abdelaziz Bouteflika. L'absence d'une image du Président hospitalisé et la limitation des visites aux seuls membres de sa famille ne rassurent pas sur son état, même si le Premier ministre, qui, à signaler, n'a jamais dit l'avoir vu, tente vainement, lors de quelques sorties médiatiques, de jurer que Bouteflika va mieux et suit de près, de sa chambre des Invalides, les affaires du pays. Le manque d'informations fiables a semé le doute et laissé place à la rumeur. Les médias ont ouvert leurs colonnes et télévisions au colportage de toutes sortes de ballons-sondes et autres bruits de couloir. Certains le disaient «rentré» à Alger dans un état comateux, d'autres n'ont pas hésité à annoncer des dates de son retour, alors que d'autres encore assuraient qu'il procédait à la signature de décrets ici à Alger et repartait en France. Que de rumeurs et de désinformation prouvant si besoin est, que la machine de la manipulation supplante comme toujours la communication en Algérie. Devant le vide communicationnel de ce côté-ci de la Méditerranée, exprimant à n'en point douter un grand mépris pour le peuple algérien, des officiels français ont pris le relais pour rassurer sur la santé du président algérien hospitalisé dans des structures militaires françaises. Ces mêmes officiels français, qui cachent mal une volonté de peser sur le débat autour de la succession de Bouteflika et en savent bien plus sur l'état de ce dernier que les Algériens ont vite essayé de combler le déficit en communication et en profiter pour parler de la succession. Le président français, François Hollande, s'empresse d'ailleurs de parler «d'institutions solides en Algérie», comme pour faire accréditer l'idée que la succession ne sera que l'œuvre des institutions, donc du système et donc de l'armée. Puis inviter le débat sur la présidentielle de 2014 en affirmant faire confiance au processus électoral, alors que les Algériens eux-mêmes ne savent pas ce que leur réservent les tractations en coulisses autour de cette succession. Un diplomate français, sous le sceau de l'anonymat, va plus loin en affirmant que Bouteflika va mieux, mais ne pourra pas continuer à assumer sa fonction de chef d'Etat. Relayé par des médias français, il ira jusqu'à inviter les Algériens à procéder déjà à la mise en place d'une période de transition. Une suggestion qui, bizarrement, a trouvé preneur chez des analystes et hommes politiques algériens. La succession semble se «cuisiner» dans la discrétion totale, entre Paris et Alger, entre Bouteflika et les «institutions solides du pays». Les Algériens eux, habitués à l'absence d'apparition publique du Président depuis déjà deux années et sachant que le pouvoir en Algérie n'est pas l'affaire d'un seul homme, renvoient au mépris que leur affichent les décideurs un total dédain, voire même de l'indifférence. Ils ont toutefois pour seul souci que d'espérer que les scénarios futurs ne soient pas porteurs de troubles ou de désastre. Le flou qui entoure cette histoire de succession et ce qui se trame en haut lieu laissent peu de visibilité sur ce que sera demain. Les transitions concoctées en dehors de la volonté du peuple ont toujours porté préjudice au pays.