Les premières images du président, hospitalisé depuis plus de 45 jours à Paris, montrent un homme considérablement diminué par la maladie. Des partis politiques réitèrent leur appel à l'application de l'article 88 de la Constitution et à déclarer l'incapacité de Bouteflika à gouverner. Le flou demeure sur le sens du déplacement du Premier ministre et du chef d'état-major de l'ANP aux Invalides et sur les «instructions» données par le Président. Le geste lent et incertain, le visage bouffi, le regard ayant perdu de sa superbe et un mouvement tremblant des lèvres. Des images muettes qui montrent un Président épuisé. Un homme de 76 ans fragilisé par une longue maladie. Le président Abdelaziz Bouteflika a été montré pour la première fois depuis son hospitalisation, à Paris, le 27 avril dernier, assis aux côtés du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et du chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah, qui lui ont rendu «visite» dans ses quartiers aux Invalides. Bouteflika est apparu assis dans un fauteuil, habillé d'une robe de chambre sombre, bougeant péniblement les membres supérieurs en recevant, avant-hier, Sellal et Gaïd Salah visiblement très affaibli et diminué, conséquence d'un AVC dont il a été victime fin avril dernier. L'état dans lequel est présenté Bouteflika aux caméras de la Télévision nationale tranche avec la propagande officielle qui se voulait rassurante, allant jusqu'à culpabiliser les voix qui en avaient douté. La séquence, qui a duré près de trois minutes, diffusée dans le journal de 17h de la chaîne satellitaire A3, montre le Président s'adressant au chef d'état-major dans un échange manifestement «éprouvant». Il a bougé davantage le côté droit que le côté gauche du visage. Les images montrent le Président portant une tasse à sa bouche de la main droite alors que sa main gauche paraît figée. L'articulation du mouvement semble aléatoire. Les «metteurs en scène» de la séquence ont pris la précaution de couper le son de l'échange. Les images resteront muettes. Il s'agit donc des premières photos et images filmées – tant réclamées – de Bouteflika après 47 jours d'hospitalisation au Val-de-Grâce puis son transfert à l'institut national des Invalides, à Paris. Et c'est la première fois également que des responsables politiques et militaires algériens sont à son chevet. Une visite à l'issue de laquelle le Premier ministre a déclaré que le Président avait «très bien réagi et son état de santé semblait correct». Cette opération médiatique intervient dans un contexte de spéculation sur l'état de santé réel du chef de l'Etat, mais aussi et surtout d'incertitude politique. Des partis et des acteurs politiques de l'opposition évoquent avec insistance, depuis quelques jours, la nécessité de déclarer la vacance du pouvoir, alors que des partisans du chef de l'Etat ont tenté, souvent sans conviction, de rassurer sur sa capacité à continuer son mandat qui court jusqu'en avril 2014. Et si les images montrées hier visent sans doute à faire gagner du temps et surtout à détendre une atmosphère politique pesante, il n'en demeure pas moins que l'état affaibli dans lequel est apparu Abdelaziz Bouteflika relance le débat sur sa capacité à revenir aux commandes du pouvoir. D'autant que les autorités politiques du pays sont restées muettes quant à la durée de la période de convalescence encore nécessaire au chef de l'Etat. Quand rentrera-t-il au pays ? Le calendrier politique sera-t-il respecté ? Mystère. La question de sa capacité à finir son mandat reste entièrement posée. Pris de court par la rechute subite du chef de l'Etat, que l'on savait déjà malade, Il est de toute évidence sûr que les décideurs sont engagés dans une course contre le temps et travaillent à éviter un scénario précipité. Préparer une succession maîtrisée. Depuis l'hospitalisation du Président, l'opposition politique multiplie les appels à l'organisation d'une élection présidentielle ouverte, qui serait l'amorce d'un processus de transition démocratique.