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Le retour au traditionnel
Le passé remis au goût du jour
Publié dans El Watan le 04 - 05 - 2006

Aujourd'hui, des mélomanes font marche arrière, préférant écouter les classiques : cheikh Guerrouabi, El Hadj El Anka, Mozart, Wagner... Comme si pour suivre la mode, il fallait faire un retour au passé, au traditionnel. Pour cette raison, quand une mode en chasse une autre, ce n'est pas toujours la nouveauté, la modernité, pour dire un mot en vogue, qui relève de la mode.
C'est le contraire. On se souvient pour les femmes, il y a eu la mini-jupe. Puis retour en force de la jupe longue. Le style court, moderne, provoquant soudain chassé par la mode longue, rétro. Pour les hommes, le pantalon « patte d'éléphant » a fait fureur une saison ou deux. Ensuite, il a disparu totalement, on trouvait ça fastidieux, immettable. Le pantalon classique est alors remis au goût du jour. Mais un jour peut-être, qui sait, le « patte d'éléphant » peut revenir, comme tout vestige du passé accueilli comme la dernière mode... La mode, c'est comme une transgression. Cela va contre la norme qui précède. Avant d'être finalement une norme. C'est une suite sans fin. Un beau jour, un écolier (mais qui, où, dans quel pays ? Personne ne sait ) a mis, sans doute dans un geste de provocation, de défi ou d'une manière irréfléchie, sa casquette la visière carrément à l'arrière. Ce simple geste d'un petit inconnu est devenu une mode, un extraordinaire engouement à travers le monde. La casquette posée à l'envers, c'est devenu le signe de la super « branchitude ». Et puis, des années plus tard, cette histoire est tombée dans l'oubli. C'est totalement passé de mode. Les gosses dans la rue ont remis leur casquette à l'endroit. Un geste subversif aussi, comme pour dire la norme, c'est aussi la transgression. On se souvient aussi des cheveux très longs des garçons. C'était devenu une institution. Les coiffeurs tournaient en rond, se croisaient les bras. Leurs ciseaux devenus superflus. Les Beatles avaient montré la voie. Aujourd'hui, les coiffeurs ont cessé de jouer les figurants, leurs boutiques ne désemplissant pas. La mode, c'est d'avoir le cuir chevelu aussi glissant (la boule à zéro) que les Bonzes qu'on croise dans les rues de Bangkok. Autre phénomène de mode, dans le colossal marché vestimentaire : c'est la toute puissance des marques, des griffes qui exerce un pouvoir sans partage et qui règne sur la mode (du moins pour tous ceux et celles qui passent le plus clair de leur temps dans les boutiques). Quel que soit l'objet convoité, une robe, un costume, une cravate, une montre, une paire de chaussures, il faut qu'apparaisse dessus la signature prestigieuse, le sigle. Le bon goût, avant, était de cacher les étiquettes. Maintenant, le nom du fabricant doit être absolument voyant, même sur un sac. D'audacieux imitateurs ont inondé le marché mondial de faux, de copies d'objet, les plus chers et les plus convoités. Tout acheteur dès le seuil de la boutique franchi, essaye d'abord de démêler le vrai du faux. Un objet donne toute les apparences d'être vrai mais qui peut garantir qu'il n'est pas faux ? Et vice-versa. Et quand passe l'inexorable rouleau de la mode à autre chose, il faut tout recommencer... Le très célèbre philosophe français du XVIIIe siècle, Montesquieu, a écrit dans ses Lettres persanes (éditions La Pleade, tome 2), un petit traité sur les mœurs de la mode sur un mode très satirique : « Je trouve les caprices de la mode chez les Français étonnants. Ils ont oublié comment ils étaient habillés cet été ; ils ignorent encore comment ils le seront cet hiver. Mais, surtout, on ne saurait croire combien coûte à un mari pour mettre sa femme à la mode. »

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