-On parle souvent de la «diaspora algérienne» et du rôle qu'elle devrait jouer dans le développement du pays. Sommes-nous en mesure d'identifier, d'une manière générale, aujourd'hui son nombre, ses caractéristiques et sa localisation? Le concept de «diaspora» est beaucoup plus large que celui du «migrant». L'Algérie a adopté une appellation particulière qui est celle de «la communauté algérienne à l'étranger». Cette dénomination est institutionnalisée avec la création d'un département ministériel, dont les missions sont fixées par voie réglementaire. Quand on parle de «diaspora», du point de vue «sociopolitique» on fait appel à tous les Algériens résidant à l'étranger ainsi que les proches, enfants et conjoints issus de notre communauté, qui s'identifient à l'Algérie. De ce fait, il est impossible à ce jour d'avoir un chiffre exact, à l'exception de ceux qui sont immatriculés auprès de nos consulats à l'étranger. Selon les dernières estimations du ministère des Affaires étrangères, il y a 1,9 million de personnes inscrites auprès de nos consulats à fin 2011, dont 91% résident en Europe, en majorité en France.Les caractéristiques de cette population n'ont pas beaucoup changé avec le temps, selon les données recueillies des services statistiques des pays d'accueil – une large majorité (près 70%), à l'instar des émigrés maghrébins, sont des employés et/ou ouvriers. Les Algériens émigrés en Amérique présentent un profil différent de ceux qui sont en Europe. -Cette diaspora est un «gisement de compétences» qui pourrait servir au développement du pays, mais dont l'apport reste pourtant limité, pourquoi ? Il est vrai qu'on a toujours cette impression que la diaspora algérienne constitue un «gisement de compétences». Il y a lieu de relativiser cette impression. D'après les statistiques des pays d'accueil, ils sont très peu (près de 16% dans les pays de l'OCDE) nos compatriotes à l'étranger qui détiennent des niveaux supérieurs et encore des compétences reconnues dans des domaines non maîtrisés en Algérie. Plusieurs tentatives sont engagées pour l'identification des ces «perles rares». Le département de la Communauté algérienne à l'étranger a ouvert sur son web, une fenêtre pour cette identification. La Direction de la recherche scientifique et la technologie du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique dispose aussi d'une plateforme accessible aux experts algériens résidant à l'étranger. Les résultats ne sont pas encore accessibles. L'apport de la diaspora au développement n'est mesurable qu'à travers des études sur les contributions à la réalisation des projets économiques et/ou de la recherche scientifique. Etudes qui restent à parfaire, suite aux premiers travaux du CNES dans les années 2000 sur la communauté algérienne à l'étranger. -On attend beaucoup de la diaspora algérienne en termes de participation à l'économie (transferts de fonds, investissement direct). Quel pourrait être son apport concret, selon vous? Quelques éléments de réponse existent. En matière de transferts, une légère baisse est enregistrée en 2011, avec un montant à 2,59 mds $US contre 2,69 mds $US en 2010, selon les données de la Banque d'Algérie. Ce montant correspond aux «transferts nets», ce qui est à l'avantage de l'Algérie, pour ce qui est des transferts par des voies officielles. Les transferts par des voies informelles, pas nécessairement illégales, sont beaucoup plus importants. Quant à la contribution par des investissements directs, elle est très peu développée pour des raisons multiples, d'ordre historique, économique et politique. -Quelles sont les conditions à mettre en place pour permettre à cette diaspora de jouer le rôle qu'on attend d'elle? L'attente de l'Algérie ne correspond pas forcément à l'attente de la diaspora quant au rôle que cette dernière peut jouer pour le développement économique et social de l'Algérie. C'est par le maintien d'un dialogue constant entre les deux parties que «des conditions » peuvent être arrêtées. Pour l'établissement de ce dialogue, la mise en place d'un cadre de consultation est importante. L'idée de création d'un observatoire a été longtemps convenue. Ce cadre a fait l'objet même d'une réglementation. Aujourd'hui on parle d'un observatoire maghrébin. Il faut savoir que dans des pays voisins, la Tunisie comme le Maroc disposent chacun d'un cadre de concertation national distinct des départements gouvernementaux.