A l'exception du Forum des organisations de la société civile du Mali (FOSCM, coalition d'ONG), dont le président Mamoutou Diabaté a critiqué avec véhémence l'accord intérimaire de cessez-le-feu conclu, mardi à Ouagadougou, entre le gouvernement malien de transition et les rebelles touareg du MNLA, la majorité de la classe politique à Bamako a globalement soutenu hier l'initiative du président Dioncounda Traoré d'enterrer la hache de guerre et de chercher à trouver une solution politique négociée avec les représentants des populations de l'Azawad. Ouagadougou (Burkina Faso) De notre envoyé spécial Celles-ci s'étaient, rappelle-t-on, rebellées en 2012 contre le pouvoir central pour dénoncer leur «abandon total» par Bamako. Le constat est de bon augure pour le dialogue intermalien qui doit s'ouvrir en automne prochain à Bamako et qui aura la lourde charge de plancher sur une solution durable à la crise du Nord-Mali. Le futur président malien, dont le nom sortira des urnes les 28 juillet prochain, disposera, en tout cas, du consensus requis pour mener les réformes qui s'imposent afin de réconcilier les Maliens. Si Mamoutou Diabaté du FOSCM estime que l'accord fait la part belle aux groupes armés touareg dans la mesure où ceux-ci ne déposeront pas immédiatement les armes et que c'est finalement «sous conditions que l'armée malienne entrera à Kidal». Pour M. Koïta, l'accord de Ouagadougou signifie au contraire «la libération totale du Mali, la libération des populations maliennes et l'amorce d'un important processus de paix». Dans le fond, le leader du PS malien n'a pas tort, car les rebelles touareg ont, en bout de course, fini par abandonner leur revendication d'indépendance. Ils se sont engagés en effet à respecter l'intégrité territoriale du Mali et la nature républicaine et laïque de l'Etat malien. A ce propos, Tiebilé Dramé, l'émissaire principal du pouvoir malien aux négociations de Ouagadougou, a expliqué, mardi après la signature de l'accord au Palais présidentiel du Burkina Faso, que le document final qui a reçu le quitus des trois parties est le résultat d'un consensus qui montre qu'«elles sont d'accord sur l'essentiel». Et pour M. Dramé, l'essentiel c'est : «(…) l'intégrité nationale, l'unité nationale, la forme laïque et républicaine de l'Etat, l'exercice de la souveraineté du Mali sur chaque centimètre carré de son territoire. Par conséquent, le déploiement de l'administration et de l'armée du Mali dans toutes les régions du Mali, y compris à Kidal». Optimisme L'événement a été aussi fortement salué par Boubacar Touré, un des responsables de l'Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma), une des principales formations politiques au Mali. «C'est un véritable espoir de paix. Nous allons dans le bon sens. Il est important que les différentes parties respectent cet accord. Nous attendons avec émotion le jour où le drapeau malien flottera sur Kidal. Nous attendons avec émotion le jour où l'armée malienne mettra les pieds à Kidal», a-t-il déclaré à la presse. Au sein des populations du Nord-Mali, on veut bien croire aussi que cet accord représente «le début d'une réconciliation». Tout le monde semble toutefois conscient que «le plus difficile viendra après l'élection présidentielle si toutefois celle-ci aura bien lieu à la date prévue». Une source proche du MNLA – dont les chefs étaient en conclave durant toute la journée d'hier à Ouagadougou – soutient par ailleurs que «l'Azawad jouera le jeu à fond pour arrêter la crise et parvenir à une paix durable». Se basant sur l'expérience amère du passé, la même source s'est néanmoins dit persuadée que Bamako ne respectera pas le protocole du cessez-le-feu. Situation, a-t-elle expliqué, qui pourrait encore compliquer la problématique. Alger et Paris applaudissent Au plan international, la France, dont les troupes ont réussi en janvier dernier à libérer le septentrion malien des griffes des terroristes d'Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) et du Mouvement pour l'unicité du jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), n'a pas manqué de saluer l'accord obtenu au bout de dix jours d'âpres négociations. Le gouvernement français – qui suit de près le processus de transition politique au Mali – y a vu une «avancée majeure dans la sortie de crise». «C'est un texte qui permet de concilier le respect de l'intégrité territoriale du pays et en même temps la reconnaissance des problèmes spécifiques au nord du pays dans la perspective de l'élection présidentielle prévue a priori le 28 juillet prochain», a souligné le gouvernement français. Au plan régional, la première réaction est venue d'Alger, capitale pour qui cet accord «devra permettre au peuple malien de se ressouder et de préserver l'intégrité territoriale». Le ministre algérien des Affaires étrangères, Mourad Medelci, qui a appelé à un «dialogue inclusif» a soutenu hier que l'accord signé entre le pouvoir malien et les rebelles touareg occupant Kidal est une «grande satisfaction» pour l'Algérie. «Au nom du gouvernement algérien, j'exprime notre grande satisfaction à la signature de cet accord et formule l'espoir que cet accord soit un point de départ dans un processus ouvert pour un dialogue», a déclaré le MAE algérien lors d'une conférence conjointe avec son homologue espagnol, José Manuel Garcia-Margallo. Concrètement, le processus engagé mardi dans la capitale burkinabè prévoit un cessez-le-feu immédiat, un cantonnement des rebelles du nord du pays et le redéploiement des forces maliennes à Kidal. Un redéploiement progressif qui aura lieu sous le contrôle des troupes de la Minusma. En revanche, le désarmement des groupes touareg ne doit intervenir qu'une fois signé un accord «global et définitif de paix» entre les nouvelles autorités installées après la présidentielle, d'une part, et les communautés et groupes armés du Nord, d'autre part. Quoiqu'il en soit, avec cet accord, le Mali dispose maintenant d'atouts importants pour sortir de la plus grave crise de son histoire.