Formée comme un grand îlot d'habitations séparant deux principales artères de la ville, la rue des Maquisards avec ses dépendances, ses impasses, ses interminables labyrinthes et ses petites ruelles donne l'impression d'être une toile hétéroclite où les paradoxes se côtoient dans un cadre unique en son genre. Il faut bien connaître la topographie des lieux pour ne pas avoir à se perdre, quoique le quartier, populaire et populeux, frappé durant des années par une étiquette de « fief des islamistes », garde toujours intact l'étrange attrait de son artère principale, passage obligé, reliant ses accès vers l'est et l'ouest, comme dans une petite ville à l'architecture rebelle. Le quartier bâti sur un terrain glissant, défiant toutes les normes de l'urbanisme a fait l'objet des premières opérations de démolition et de relogement avant la fin de l'année 2001. La réaction des autorités de la ville faisait suite à la catastrophe de Bab El Oued. Un syndrome qui a stimulé une véritable psychose dans une ville apte à connaître le même sort de par ses particularités géographiques. Les cicatrices de cette opération, menée tambour battant contre la volonté de nombreux propriétaires, sont visibles à l'entrée des lieux du côté de l'avenue Kitouni Abdelmalek. Depuis, le quartier, qui a connu les rafles et les ratissages durant la période du terrorisme, ne sera que l'ombre de lui-même. Le retour au calme incitera les habitants à se prendre en charge eux-mêmes. C'est grâce à des actions de volontariat que le quartier a vu l'assainissement, par des moyens rudimentaires, de ses principaux passages avec l'amenée des conduites d'eau potable. Face aux décombres donnant sur la vallée de Sidi M'cid, des bâtisses inhabitées, transformées en écuries ou en décharges, marquées de croix rouges géantes, se dressent toujours, comme pour narguer les passants. La cité construite sur une pente raide est calme en haut, grouillante et très animée en bas. Les petites échoppes de fortune côtoient des vidéothèques bien « achalandées » alors que les petits marchés improvisés de légumes et de fruits marquent le quotidien des habitants pénalisés déjà par une topographie qui a toujours découragé les dépositaires de produits alimentaires de base. Les différences des niveaux de vie sont clairement apparentes à la rue des Maquisards. Alors que des citoyens se débrouillent pour colmater les fuites de leur toiture, il n'est pas étrange de voir des maisons de trois étages bâties dans des ruelles encore anonymes. Le versant de la cité surplombant l'avenue du 20 Août 1955 révèle un décor « misérabiliste ». Une vie parmi les décombres dans des bâtisses qui tiennent à peine sur une descente qui menace de se déplacer un jour plus bas. Les résidants, dont la plupart sont des locataires, ont toujours vécu avec la peur au ventre durant les journées de forte pluviométrie où les risques d'effondrement se multiplient. Depuis deux ans, ces citoyens ont terminé les dernières nuits du Ramadhan à la belle étoile, alors que l'hiver dernier a apporté son lot de panique, lorsqu'une dizaine de familles ont assisté à un effondrement des escaliers de leur maison. Ces risques devenus récurrents ont été signalés à maintes reprises par les services de la Protection civile qui ont recensé déjà depuis deux années plusieurs maisons menacées d'effondrement. Des rapports ont atterri chez les services de la municipalité de Constantine mais ne semblent pas inquiéter des élus préoccupés beaucoup plus par les prochaines échéances électorales. A moins qu'une catastrophe ne survienne pour bousculer la conscience.