C'est devenu une tradition à Montréal. L'arrivée du Ramadhan signifie le changement des menus et des horaires de travail chez les restaurateurs du quartier Le Petit Maghreb, où se concentrent la majorité des petits commerces d'alimentation, les boulangeries et pâtisseries et des boucheries détenues par des Algériens du Canada. Les autres jours de l'année, on va au Petit Maghreb pour acheter des produits importés du Maghreb (limonade Hamoud, harissa, semoule, toutes les marques de couscous… et même le célèbre flan Nouara !). Les boucheries halal ont aussi pignon sur rue quoique, parfois, aucune logique économique ne justifie l'écart des prix entre elles et les autres boucheries tenues par des non-musulmans, mais proposant de la viande halal. Mais pendant le Ramadhan, on peut aussi y aller pour manger à l'heure du f'tour. Mohamed Laïhem a quitté Alger il y a 26 ans dont cinq passés à Miami aux Etats-Unis. Spécialisé en développement d'affaires, il a acheté, il y a quelques mois un restaurant sur le déclin malgré son bon emplacement dans le quartier maghrébin. Il l'a rebaptisé Le Corail et lui a donné une nouvelle vocation culinaire : grillades de viandes et de poissons sur charbon. Il n'est pas cuisinier lui-même. Mais en bon développeur d'affaires, il a recruté Sofiane Boukhari comme chef cuisinier. Artiste complet, il est aussi décorateur d'intérieur et musicien. Avant de s'occuper du menu, il a participé à la rénovation du lieu. C'est lui qui a conçu et réalisé le nouveau décor du restaurant qui domine la ville d'Al Qods (Jérusalem). Pour le patron des lieux, cette ville symbolise la communion des trois grandes religions monothéistes. Pour le Ramadhan, Mohamed Laïhem a fait appel à Samira Zidouk pour la cuisine. Elle vit au Canada depuis une quinzaine d'années et exerce comme coiffeuse, mais laisse tomber peigne et ciseaux pendant le mois sacré. «Je voulais que les plats servis pendant le Ramadhan aient une saveur typique à ce mois. Pas de grillades ou autre», explique le patron du Corail. A quelques minutes du ftour (20h39 !), la salle était pleine de clients majoritairement des Algériens et des Marocains : des clients seuls, des familles avec enfants, des couples. «J'ai fini mon travail tard et j'ai proposé à mon mari de venir ici», nous confie une cliente habituée du lieu. Accompagné de la musique du dernier CD du Montréalais Karim Saâda, le menu était composé d'une hrira (alternée avec une chorba, les autres jours), bourek avec salade de carottes et fèves et un ragoût de pomme de terre à la viande et une boisson (on dit breuvage au Québec !!!). Pour finir la soirée, on peut choisir parmi la vingtaine de cafés du Petit Maghreb. Au café Safir, on change les horaires pendant le Ramadhan, car la majorité des clients font le carême. «Si tu veux manger à midi, il y a le Mc Do qui n'est pas loin», nous dit en plaisantant son sympathique propriétaire, Hamou Becherigui.