Promis à une ouverture salutaire, le champ audiovisuel algérien reste, une année après la décision prise par le gouvernement de le libérer totalement du monopole étatique, une cruelle illusion. Si près d'une quinzaine de chaînes privées se sont empressées de s'engouffrer dans le vide juridique pour se lancer sans aucune préparation et souvent anarchiquement dans l'aventure, en attendant la promulgation d'une loi qui tarde à venir, et qui pour beaucoup ne verra peut-être jamais le jour, les résultats au jour d'aujourd'hui concernant la transformation du paysage télévisuel tant espérée sont loin d'être reluisants. Passée la phase de l'effet de surprise ou de curiosité qui ont un moment capté son attention, le téléspectateur algérien est vite revenu à l'évidence en se posant cette question cruciale : à quoi sert-il d'avoir autant de télés privées en un temps record, si le paysage télévisuel national demeure dramatiquement frappé du sceau de la médiocrité dans son ensemble ? C'est qu'au lieu de lui offrir un programme autrement plus intéressant et plus divertissant, et surtout de qualité relativement supérieure à celui qui a envahi jusque-là son quotidien, ces chaînes se sont pour la plupart montrées incapables de relever le niveau de leurs productions et, pis encore, se sont laissées entraîner dans une entreprise de facilité qui porte un grave préjudice à leur crédibilité. La meilleure illustration de ce constat plutôt amer et par conséquent qui risque de peser lourd sur l'avenir de la télévision privée en Algérie – perçue comme un vecteur indispensable pour le développement culturel dans notre société – est donnée par le plus gros score d'audience réalisé par l'unique en ce mois de Ramadhan qui demeure, quoi qu'on dise, un test de comparaison imparable. Si la télé publique continue à ce point à trôner sur le champ audiovisuel, c'est sûrement que l'expérience de la télévision privée est mal partie et mérite une étude bien plus sérieuse, plus codifiée pour son implantation dans l'espace de communication qui nous interpelle à l'heure où le monde médiatique évolue à une vitesse vertigineuse et sert des intérêts politiques et économiques bien précis. Pourquoi donc avoir raté un virage important alors que l'Algérie réunit toutes les conditions nécessaires, matérielles et humaines, pour démocratiser un secteur aussi vital qui n'en peut plus d'être instrumentalisé au service exclusif du pouvoir politique ? Si les promoteurs des nouveaux écrans, qui s'adressent aux Algériens mais à partir d'autres frontières, ont leur part de responsabilité dans ce fiasco qui ne dit pas son nom, la faute incombe principalement au gouvernement qui, à force de tergiverser sur les principes de la réglementation, a fini par créer une situation de désordre et de confusion qui place le champ audiovisuel dans une position encore plus inextricable.