L'action à laquelle ont appelé les non-jeûneurs pour s'élever contre «l'inquisition et réclamer le droit à la liberté de conscience» a eu lieu, hier, dans le calme et la sérénité, à Tizi Ouzou. Place du carrefour Matoub Lounès, en face du commissariat central de la capitale du Djurdjura, des citoyens ont rompu le jeûne en public. A 11h, les premiers non-jeûneurs arrivent, éparpillés un peu partout autour du lieu du rassemblement. «Je suis venu de Béjaïa pour prendre part à cette action, car il s'agit d'une manifestation légitime pour réclamer le droit au respect de l'autre. Il y a certes une autre action similaire à Aokas, mais j'ai préféré venir ici, car assister à une manifestation qui se déroule sur une place baptisée du nom de Matoub Lounès est un grand honneur, surtout quand on sait que ce chantre avait toujours, de son vivant, revendiqué les libertés individuelles», nous a-t-il affirmé un jeune homme. Une femme venue prendre, elle aussi, part au rassemblement, estime que sa participation à cette action est motivée par les comportements zélés de certains fanatiques qui traitent les non-jeûneurs de tous les noms d'oiseaux. «Moi je fais carême, mais je suis contre les fanatiques qui n'ont aucun grain de tolérance. J'ai vu de mes propres yeux, la semaine dernière, un commerçant qui ne voulait pas vendre d'eau fraîche à un citoyen malade. C'est vraiment incroyable», déplore-t-elle. L'ambiance était sereine dans la mesure où tout le monde, jeûneurs et non-jeûneurs, ont convergé ensemble pour dire «halte à l'intolérance». Les manifestants ont également brandi des banderoles sur lesquelles on pouvait lire, entre autres, «Contre l'inquisition» et «Pour la liberté de conscience». A 12h, des non-jeûneurs ont pris des sandwichs et des bouteilles d'eau pour casser la croûte avant les prises de parole. Bouaziz Aït Chebib, président Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, a, dans son intervention, souligné l'objectif de cette action qui consiste, selon lui, à faire respecter les droits individuels. «Chacun est libre. Nous ne sommes pas contre la religion, mais nous n'accepterons pas l'inquisition et le non-respect de l'autre. Parmi nous ici, aujourd'hui, il y a des musulmans qui font carême. Il y a aussi des chrétiens et des athées. Chacun doit respecter l'autre. Nous assistons à une inquisition de plus en plus provocatrice et assumée de la part du régime, notamment en période de Ramadhan, pendant lequel des citoyens sont pourchassés et persécutés. C'est pour cela que nous avons décidé de ne plus accepter l'inacceptable», a-t-il lancé devant une assistance composée essentiellement de militants du MAK. D'autres intervenants se sont succédé pour mettre l'accent sur la nécessité de la liberté de conscience qui est, selon eux, indispensable pour l'avancée de la démocratie. Celle-ci, ajoutent-ils, est une référence incontournable pour les libertés individuelles. Une jeune fille a pris ensuite la parole pour raconter les circonstances dans lesquelles elle a été intimidée quand elle a été aperçue en train de boire de l'eau. «Un policier m'a interpellée, me disant qu'il est interdit de manger pendant le Ramadhan en public. Et quand j'ai demandé s'il y avait une loi qui interdit de déjeuner, il m'a dit qu'il n'y a pas de loi, mais il voulait me présenter au procureur. C'est vraiment de l'inquisition et une atteinte aux libertés individuelles», a-t-elle martelé. Après presque une heure de rassemblement, la foule s'est dispersée dans le calme et sans le moindre incident.