La tendance est en train de s'inverser au profit du raisin de table et au détriment du raisin de cuve. Les vendanges, celles du raisin de cuve, devront démarer la semaine prochaine comme à pareille époque. Pour ce qui est du raisin de table, qui lui était mûr au moment du ramadhan, sa culture a été fortement boostée, les jeûneurs, étant de grands dépensiers, ont acheté le kilo de raisin à des prix prohibitifs. C'est la deuxième année consécutive que les producteurs de raisin bénéficient de la «baraka» du ramadhan. Du coup, la tendance est en train de s'inverser au profit du raisin de table et au détriment du raisin de cuve, «lui dont l'Etat s'est détourné, les responsables du secteur agricole ayant coupé toutes les subventions à la viticulture. Ils l'ont fait parce qu'ils craignent hypocritement d'être taxés de favoriser la production d'un produit dit «haram». Je dis hypocritement parce que cela ne les gêne pas que ce même produit soit importé à coups de devises fortes !», fulmine un viticulteur. A cet égard, et alors que le raisin de table s'est écoulé entre 150 à 200 DA, celui de cuve sera payé au maximum par les transformateurs à 36 DA le kilo pour l'Alicante le plus cher des trois cépages que produisent les 4 000 à 4 500 ha de vignobles de cuve, une superficie réduite à une peau de chagrin en raison des arrachages. La disparité de prix entre le raisin de table et de cuve est telle qu'à Tlemcen, réputée pour ses fameux coteaux, il ne reste de vignoble de cuve que celui des fermes pilotes qui demeurent biens étatiques. De la sorte, le Cinsault, un cépage dit double fin parce qu'il peut être consommé en raisin de table qui, cédé à 34,50 DA le kilo aux transformateurs, verra 45% de sa production livrée au marché en frais, cela sachant que le Cinsault constitue près de la moitié du vignoble de cuve : «Mais à cela s'ajoute la concurrence que font les céréales à la viticulture du fait que les premiers sont soutenus financièrement de façon si flagrante et si considérable qu'on a de la peine à ne pas croire que c'est pas pour tuer la viticulture dans sa région de prédilection. Mais c'est d'autant voulu lorsqu'on pense à la formidable mobilisation des pouvoirs publics pour mettre tous les moyens matériels au service de la moisson-battage, par exemple!». Un autre interlocuteur en aparté nous glisse : «Le jeu est clair, une viticulture sans soutien et livrée au bon vouloir des transformateurs qui peuvent d'ailleurs se passer de transformer le raisin puisqu'ils peuvent importer le vin et le commercialiser et gagner bien plus qu'à soutenir la viticulture à la place de l'Etat». C'est dire sous quels auspices se présente la campagne vendange 2013. Pourtant, du côté de l'ONCV, sans démentir la régression que le secteur subit, c'est un autre son de cloche qu'on entend. On indique tout d'abord qu'il a été enregistré 600 mm de pluviométrie, ce qui constitue une chance pour le vignoble dans une région semi-aride où la moyenne des précipitations est de moitié. Cela se traduira par des pics de production et de productivité autrement plus avantageux qu'en 2012. Néanmoins, dans les zones littorales, l'oïdium a frappé en raison de la pluviosité et des brouillards persistants. Les vignerons qui disposaient de fonds en propre ont traité leurs plants contre la maladie mais la majorité n'a pu le faire. Du côté de la coopérative viticole, on déplore des pertes, selon les zones, de l'ordre de 5 à 10% pour les moins touchées et de 20 à 25% pour les plus endommagées. Du côté de l'ONCV, on tire son épingle du jeu. En effet, les propriétaires de 1200 ha de vignobles qui se sont engagés contractuellement à lui livrer leur récolte ont bénéficié d'avances en numéraires et de crédits sous forme de produits phytosanitaires et d'engrais pour la bonne conduite de l'itinéraire technique sur leurs parcelles.