Les rues de Beyrouth sont moins bondées qu'à leur habitude et les Libanais tentent de profiter des derniers moments de l'été malgré une inquiétude grandissante : «Notre pays n'est pas dans une très bonne passe. Beyrouth (Liban). Les Syriens affluent, le conflit s'enlise là-bas et il gagne le Liban chaque jour un peu plus», confie une Beyrouthine d'une quarantaine d'années. La situation sécuritaire s'est en effet dégradée ces derniers mois dans le pays du Cèdre comme en témoignent les chiffres d'occupation des hôtels de Beyrouth. Selon le ministère du Tourisme libanais, ces derniers étaient occupés à près de 70% en mai 2012, alors qu'un an après, il peinait à atteindre 58%, preuve s'il en faut que le Liban est désormais boudé par les touristes. «Cette année, le chiffre d'affaires est mauvais, très mauvais, nous sommes en permanence obligés de faire des remises et des offres spéciales si on veut attirer la clientèle, et encore…», révèle une gérante d'un hôtel de la capitale. Même constat dans un magasin de prêt-à-porter, sur la rue marchande de Hamra : «Malgré les soldes, les ventes sont en berne. Je suis à 80%, peut-être qu'en proposant des produits gratuits, j'arriverai à épuiser mon stock», ironise la responsable. Un habitant sur quatre Il faut voir un lien de cause à effet entre la situation en Syrie. En effet, l'afflux de réfugiés syriens augmente la demande interne de manière conséquente résultant sur une inflation généralisée qui est passée à 8,8% entre janvier et juin 2013. «C'est fou, un appartement qui coûtait environ 800 dollars (environ 65 000 dinars, ndlr) en 2010 se loue 1400, voire 1500 dollars actuellement», témoigne un doctorant en études politiques. La crise du logement que vit la capitale n'est pas inédite, mais connaît une ampleur sans précédent en raison de l'afflux des réfugiés syriens, une question qui divise les Libanais : «Il est du devoir du Liban d'accueillir des populations en danger», estime un homme sur une terrasse alors que son ami tempère : «Mais quand c'est au détriment des Libanais, il faut agir. Seulement, comme vous le remarquez, nous n'avons pas réellement d'Etat.» Il est vrai que si la présence militaire n'a eu de cesse d'augmenter ces derniers jours, croiser un policier reste insolite dans la capitale, ce qui ne semble pas choquer : «L'armée a toujours été plus présente», poursuivent les deux hommes. Un récent bilan de l'ONU fait état de presque 1 million de réfugiés syriens au Liban et si la tendance continue, un habitant sur quatre du pays sera syrien. Le président libanais, Michel Sleiman, a interpellé la communauté internationale à maintes reprises sur «l'incapacité du Liban à faire face à cet afflux massif en provenance de Syrie». Cet appel à l'aide trouve son écho chez dans les dizaines de familles syriennes qui n'ont que les trottoirs beyrouthins, parfois étroits, pour vivre et dont les enfants n'ont d'autre choix que quémander pour avoir l'autorisation de cirer les chaussures des passants en échange d'une somme dérisoire.