Le professeur Jeanine-Nadjia Belkhodja-Kessous a été inhumée, hier, au cimetière de Sidi M'hamed d'Alger. Agée de 85 ans, elle est décédée des suites d'une longue maladie à l'hôpital de la Salpêtrière à Paris. Après un mois d'hospitalisation au CHU de Bab El Oued, elle a été transférée d'urgence en France, car son état s'était aggravé. Elle y restera sept mois. Jeanine-Nadjia Belkhodja a été l'une des premières étudiantes en médecine algérienne. Elle obtient sa thèse de doctorat en 1955. Pendant la Révolution, elle est emprisonnée pour des tracts. Envoyée à la frontière tunisienne, elle opère les blessés. En 1959, elle créée une maison d'accueil à Tunis pour les djoundiate. El Watan Week-end lui avait consacré un portrait lors d'une série de suppléments pour le cinquantenaire de l'Indépendance. A la libération, elle travaille à la construction du système de santé publique avant de militer pour la création d'une politique d'espacement des naissances et le développement de la contraception. Elle fait partie des organisatrices du Programme national de planification familiale des années 1970. A l'hôpital Maillot, où elle dirige le service de gynécologie-obstétrique, elle accueille de jeunes femmes enceintes non mariées pour leur permettre de mettre au monde leur enfant en toute sécurité. «Quand il n'y avait plus de lit, elle installait des matelas par terre», se souvient une proche. A cette époque, Jeanine-Nadjia Belkhodja intervenait régulièrement sur les ondes de la radio pour sensibiliser les auditeurs à la santé maternelle et infantile. Le réseau Wassila et l'Association contre les violences faites aux femmes la décrivent dans un hommage comme «la moudjahida puis le médecin qui tint la main à toutes les victimes de sa société». «Elle avait une assurance tranquille et une grande détermination, raconte Fatima Oussedik du réseau Wassila. De par son métier de gynécologue, elle était au plus près des femmes et cela l'avait confrontée aux malheurs des femmes célibataires abandonnées. C'est probablement pour cela qu'elle était aussi investie.» Engagée pour la santé des femmes, elle militait aussi contre les violences. «En 2001, après les attaques de Hassi Messaoud, c'est elle qui a pris en charge les femmes violentées. Elle les a soignées physiquement et psychologiquement», raconte Faïka Medjahed, militante des droits des femmes.