C'est un maître. Un cheikh ! Une légende vivante. Une icône d'une musique savante. Un templier de la musique arabo-andalouse. Il a 60 ans de carrière au compteur. Il s'appelle Ahmed Serri. Sa biographie vient d'être signée par le journaliste Hamid Tahri, aux éditions Quipos. C'est un beau livre intitulé Ahmed Serri, le chant du rossignol, retraçant la vie d'un grand maître de la musique arabo-andalouse ou encore de la sanaâ, Ahmed Serri. Et cela n'a pas de secret ! Car l'acception du vocable «serri» en arabe veut dire : secret. Au contraire ! Ahmed Serri a vécu, respiré et transpiré une musique fleurant très bon le terroir algérois et algérien. Il a tutoyé l'histoire et les interstices de la mélomanie andalouse d'un raffinement gouleyant, et ce, en tant qu'interprète, instrumentiste, professeur, pédagogue ou encore chef d'orchestre. Ce ne fut guère aisé. Car une force tranquille, une passion dévorante et dévastatrice, une ambition affichée musicalement parlant, une aura altière et puis cet amour, cette affection pour ce patrimoine ancestral, animent Ahmed Serri. Aussi, Hamid Tahri, l'auteur, à travers ce beau livre, compulse l'album de la vie d'Ahmed Serri. L'itinéraire d'un enfant pas du tout gâté. Au contraire, il s'est fait, il s'est construit lui-même. Un self-made-man de la musique arabo-andalouse. Un voyage où l'on n'est pas déçu. Un «trip» montrant et démontrant que Ahmed Serri chante, joue et évolue avec l'âme «sœur» : la musique. Une visite guidée dans les venelles de La Casbah d'Alger, son giron natal, filial et musical. Des haltes historiques, mnémoniques, historiques, poétiques, pittoresques…Et puis, surtout nostalgiques d'Alger d'antan. Et ce, en illustrant son «Magical Mystery Tour» (comme diraient les Beatles) par un foisonnement de photos tantôt en noir et blanc tantôt en couleur, des mots ciselés, élégants et justes contant et racontant sa «success story». La protection du patrimoine, son sacerdoce Enfant terrible et de la balle de La Casbah, Ahmed Serri a des référents et ses références lui ayant ouvert la voie, pour ne pas dire «voix royale» au chapitre très policé de la musique arabo-andalouse. Comme Hadj M'rizek qui le fascine, Cheikh Slimane Hannani, le trouvère disparu mais retrouvé, Kaddour Bachtobdji, son repère, Edmond Nathan Yafil, l'incontournable, Mohamed Benteffahi dont il est le digne héritier, Abderezzak Fakhardji, le maître incontesté, Mohamed Ben Ali Sfindja, le précurseur, Bakir Messekdji, l'ultime conservateur des Qcid (texte ancien)… Et puis, El Boudali Safir, cet adjuvent, cette caution à la musique. Toujours en feuilletant la biographie d'Ahmed Serri, l'on s'attardera immanquablement, ici, par une photo exhibant un «kid» de 9 ans, coiffé d'un tarbouche, à la moue juvénile et insouciante ; là, celle du maître Sfindja aux moustaches «turques» en 1890 ; là-bas, officiant aux côtés de la diva Fadéla D'ziria en 1955, ou encore à côté, la photo de Messali Hadj, un leader nationaliste auquel il vouait une admiration. C'est qu'Ahmed Serri a œuvré pour l'indépendance de son pays, l'Algérie. Un devoir ! Dans cet ouvrage, son travail de proximité quant à la protection, sauvegarde et autre préservation du patrimoine de la musique arabo-andalouse est souligné par des coups de gueule dénonçant la bureaucratie et coups de cœur pour la nouvelle génération. Hamid Tahri livre et délivre au courant d'une plume sémillante à hauteur d'homme un ouvrage exhaustif, choral, musical et surtout olfactif. Car aux fragrances exhalant un parfum tenace. Un air inoubliable, celui du rossignol Ahmed Serri. Sid Ahmed Serri, le chant du rossignol ( Biographie) . Hamid Tahri/Quipos éditions. (novembre 2013) 324 pages.