La Bibliothèque nationale d'Algérie a abrité, hier matin, une conférence de presse à l'occasion du centenaire de la mort de l'artiste Mohamed Ben Ali Sfindja, grand maître et pionnier de la musique arabo-andalouse. Cette rencontre a regroupé un ensemble de spécialistes de la musique andalouse dont, entre autres, Sid Ahmed Serri, Noureddine Saoudi, Youcef Ouznadji (président de l'association les Rossignols d'Alger). Ainsi, l'illustre homme qu'a été Mohamed Ben Ali Sfindja, a été évoqué par le maître Sid Ahmed Serri. D'emblée, il a indiqué qu'il ne parlerait pas seulement de la disparition de Sfindja, le 30 juin 1908 : « Nous voulions faire cette conférence suivie d'un concert avec les élèves d'Alger que nous devons au regretté Sfindja, mais j'espère que nous arriverons à organiser un événement à la hauteur de l'homme. » D'une voix émue, Sid Ahmed Serri a estimé qu'on a tendance à oublier certains hommes qui ont apporté énormément de choses à la culture algérienne et ce, malgré la colonisation. « Nous n'avons pas, dira-t-il, assez d'informations pour parler des anciens, car, à l'époque, les gens n'écrivaient pas. » Né à Alger en 1884, Sfindja était l'élève du maâlem Abderrahmane Menemeche. Initié à l'art de la çanaâ, il excella dans la nouba et dans tous les genres apparentés à celle-ci. Joueur de kwitra, il forma plusieurs musiciens qui deviendront plus tard des monuments. Parmi ses disciples juifs et musulmans, citons maâlem Saûl Durant, alias Mauzino, Abderrahmane Saïdi, Mohamed Ben Teffahi, Edmond Yafil. Ce dernier ne voulait pas que Sfindja disparaisse sans laisser derrière lui une empreinte. Il aida ainsi Yafil à rassembler l'ensemble des textes des mélodies du corpus de la çanaâ dans un livre édité en 1904, une des sources les plus sûres en ce qui concerne les poésies chantées. Poussé par Edmond Yafil, Sfinja enregistra des disques en 1901, laissant un nombre appréciable d'enregistrements qui regroupent tous les genres de la çanaâ. Sid Ahmed Serri révélera à l'assistance que son regretté professeur Mohamed Ben Teffahi se plaisait à suivre Sfindja là où il se produisait. « Sfindja est mon arrière-grand-père spirituel. J'estime que la chaîne n'a pas été rompue puisque nous continuons à former des générations entières grâce à nos aînés. Preuve en est : j'ai appris tout ce que je sais par, entre autres, Abderrezak Farkhardji qui, lui-même, était l'élève de Ben Teffahi. » Notre interlocuteur reconnaît que la musique andalouse continue d'être enseignée dans des conditions précaires. Le maître estime que l'Etat se doit de prendre en charge cette musique. Cette dernière se doit d'être enseignée dans les écoles. De son côté, l'anthropologue et musicologue Noureddine Saoudi, a révélé qu'il avait l'âge qu'il faut pour avoir connu des monstres de la musique andalouse en les personnes de Abdelkrim Dali, Abderezzak Fakhardji. Pour l'artiste, l'histoire musicale reste à écrire et ce, avant Menemeche. Noureddine Saoudi fait partie de ceux qui pensent que l'individualité de notre musique est liée à notre terroir.