Walid en meneur d'hommes, accompagné de sept de ses camarades de l'université, ont décidé de rendre visite à Ali Benflis, candidat malheureux de la présidentielle de 2004. «Il nous a reçu une heure dans son bureau, au Val d'Hydra, pour évoquer la situation générale du pays. Il était très attentif et s'est prêté volontiers au jeu des questions-réponses. Il répondait avec lucidité et franchise», révèle-t-il. Outre le ballet incessant d'anciens soutiens, militants FLN pro-Benflis et autres responsables politiques, Ali Benflis reçoit des jeunes, des étudiants, des cadres, des hommes de lettres et des hommes d'affaires. Objectif : «Ecouter les jeunes et ramasser le maximum de propositions pour étoffer son programme de campagne», nous renseigne un proche de l'ex-chef de gouvernement. Benflis est, selon nos interlocuteurs, cette personnalité sur laquelle des jeunes fondent «l'espoir de changer les choses». «Il connaît le sérail et peut mener à bien le changement tant attendu sans pour autant remettre en cause les fondements de la nation», arguent-ils. D'ailleurs, «il n'aura pas besoin de faire des discours sur les jeunes, puisque ils seront au centre de sa campagne et les porte-parole de son programme», annonce Walid. Ali Benflis a-t-il réussi à les charmer ? Quel discours a-t-il tenu à ses hôtes ? «Il nous a assuré sa détermination à opérer le changement, notamment celui de passer le flambeau à la jeune génération», confie un étudiant. «Il nous a offert l'opportunité de lui recommander des mesures opérationnelles et des projets concrets pour son programme de campagne.» Benflis a «promis et donner l'opportunité de nous investir dans sa campagne électorale, puisque nous serons programmés dans son agenda et des salles de meeting nous seront affectées à l'occasion», nous annonce un étudiant. Du coup, Walid et ses copains ne cessent de médiatiser, sur les réseaux sociaux, leur rencontre avec Ali Benflis. Le club de soutien à Benflis se transformera bientôt en un comité sous l'appellation de «coordination nationale des étudiants pour le changement». De Benbitour à Ali Benflis Même son de cloche du côté de la Coordination des jeunes cadres algériens (CJCA) conduite par Maâmar Belaslouni, la trentaine, ingénieur dans un établissement financier privé. «Nous l'avons rencontré pour la première fois en juin dernier», nous informe Maâmar. La coordination qu'il dirige avait le choix entre Ahmed Benbitour et Ali Benflis. «Nous respectons Ahmed Benbitour, mais Benflis, fort de ses soutiens et de sa popularité, est naturellement notre candidat, il est au fait des choses et peut amorcer le changement», confie-t-il. «Nous sommes partis spontanément le voir et il nous a reçus sans protocole, nous avons débattu des questions de l'heure. Il nous a exposé sa vision du devenir de l'Algérie, de sa conception de la politique. Il a insisté sur le concept de ‘société des libertés', à savoir la séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice», révèle Belaslouni. Selon lui, Ali Benflis insiste sur la nécessité d'aller vers l'ouverture économique et d'opter pour le libéralisme dans le cadre du concept de la «société solidaire». Transition générationnelle Après ce premier rendez-vous, la CJCA a eu à formuler des propositions dans le cadre d'un think tank. «Nous avons maintenu le contact et nous avons eu en tout quatre réunions de travail, puis c'est à son conseiller personnel de prendre le relais et nous lui soumettons nos propositions et travaux», poursuit-il. Concernant le rôle de la CJCA – qui regroupe actuellement quelque 3000 membres – lors de la prochaine campagne électorale, le porte-parole affirme : «On aura un rôle important à jouer d'abord en sensibilisant les jeunes cadres sur la nécessité de soutenir Ali Benflis puisqu'il promet d'engager le processus de transition générationnelle.» D'autres jeunes militants du FLN ont formulé le vœu de voir «enfin la famille FLN réunie à nouveau et que les histoires de redressement ne se reproduisent plus», affirme un militant de Djelfa. La réponse de Ali Benflis est justement «d'aller vers une réconciliation au sein du parti, de préférence avant même la présidentielle et ce vœu n'est aucunement lié à la prochaine échéance électorale, uniquement pour la stabilité du parti et du pays», a-t-il argué. Un jeune cinéaste soutient que Benflis «est très à l'écoute des artistes et de leurs préoccupations et que son projet accorde une importance capitale à l'art et la culture». En attendant l'officialisation de sa candidature, Ali Benflis et son staff semblent avoir soigneusement tout préparé, loin des caméras et des projecteurs.