- Nous assistons à une hausse généralisée des prix des produits alimentaires. Quel impact relève la Fédération algérienne des consommateurs sur le niveau de vie des ménages ? Il faut savoir d'abord que la hausse des prix des produits laitiers et autres aliments issus de l'importation est injustifiée. Les commerçants arguent la majoration des prix par la dévaluation du dinar, mais en réalité les produits vendus sont issus d'anciens stocks. C'est de la pure spéculation. Nous dénonçons cette fraude qui ne vise que le gain facile au détriment de la stabilité des ménages et de l'économie. On n'a pas non plus vu d'importateurs baisser leurs tarifs quand les cours des produits alimentaires baissent sur le marché mondial. Nous avons eu écho d'augmentations exagérées. A In Guezzam par exemple, où le lait pasteurisé ne parvient pas aux consommateurs, le paquet de 500 grammes de lait en poudre est vendu à 400 DA, alors que son prix ne dépassait pas 230 DA il y a quelques jours. Nous avons relevé plusieurs cas de fraude. Les lots des produits touchés par les augmentations de prix concernent d'anciens stocks. Les grossistes n'ont pas fait de nouvelles commandes qui pourraient être concernées par les conséquences de la dévaluation du dinar. C'est le cas aussi des légumes secs. Nous dénonçons par la même occasion le détournement des matières dont les prix sont soutenus par l'Etat. Des quantités énormes de poudre de lait sont utilisées à d'autres finalités qu'assurer le sachet de lait à 25 DA, pour fabriquer des yaourts et des fromages vendus à des prix exorbitants.
- Où se situe la défaillance ? Comment les pouvoirs publics peuvent-ils remédier à cette situation ?
Pour que les prix connaissent une certaine stabilité, il faudrait redynamiser le rôle des offices de régulation. Les points de vente de l'Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) offrent la possibilité de se procurer des légumes secs à des prix plafonnés par l'Etat, donc beaucoup moins élevés que ceux pratiqués en vente libre. Malheureusement, beaucoup de chefs de famille l'ignorent et les points de vente ne couvrent pas la demande au niveau des agglomérations. Il y a aussi des offices de régulation créés depuis des années comme l'Office national de régulation des légumes et des viandes (Onilev) dont personne ne parle et dont l'impact n'est pas vraiment visible sur le terrain. Les systèmes de régulation doivent être généralisés à tous les produits frais pour éviter qu'ils ne soient otages des intérêts des spéculateurs. Il faut qu'il y ait également plus de contrôle et de suivi des mécanismes de soutien. Des textes de loi existent pour organiser les marchés et protéger le pouvoir d'achat des Algériens mais l'impact est absent sur le terrain.
- Ces hausses des prix ont-elles engendré un déséquilibre dans l'orientation de la consommation ?
Bien sûr que oui. Sachant que les viandes et les poissons sont hors de portée de la majorité des ménages, avec la hausse des prix des produits laitiers et des fruits et légumes, une catastrophe sanitaire est à craindre. Les gens sont obligés de consommer puisque ce sont les produits de large consommation qui sont touchés par les augmentations, malheureusement, ce sera au détriment de la qualité de l'alimentation. Le nombre des familles qui peuvent diversifier leur alimentation sera de plus en plus réduite. Il ne faut pas perdre de vue que les ménages à revenus moyens consacreront encore plus de budget pour l'alimentation, et les autres besoins (santé, loisirs, habillement, habitat…) seront délaissés. Les conséquences se feront ressentir dans quelque temps.