La réunion du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA), tenue jeudi à Bruxelles au siège de l'Otan, revêt en ces moments de bouleversements géostratégiques une importance toute particulière. Elle a été suivie le même jour par la réunion de la commission Otan-Ukraine, ainsi que par celle du comité des plans de défense et du groupe des plans nucléaires. Importance particulière, dans la mesure où la Russie a fait savoir à l'Ukraine, deux jours auparavant, sa réprobation quant à la manière dont sont menées ses négociations pour rejoindre l'organisation transatlantique. Non pas que la Russie ait un quelconque droit tutorial sur l'Ukraine dans ses choix politiques ou économiques, mais il se trouve que le « contentieux » russo-ukrainien au plan militaire n'est pas tout à fait assaini depuis la sortie de l'Ukraine de la Fédération russe. Si dans les domaines économiques le règlement des différends est négocié sur des compromis (rappelons-nous la crise du gaz de décembre dernier), le domaine militaire, lui, ne laisse pas beaucoup de marge de négociations. Que faire des vaisseaux russes amarrés au port d'Odessa, des porte-avions, sous-marins nucléaires et rampes de lance-missiles se trouvant dans les eaux territoriales ukrainiennes ? La Russie de Vladimir Poutine demeure vigilante quant au respect par l'Ukraine des accords donnant le droit à la flotte russe de garder des bases dans ses eaux maritimes pour quelques années encore. Aussi, l'impatience de l'Ukraine à vouloir rejoindre l'Otan le plus vite possible ne plaît guère à Poutine. Surtout que les Américains ont, immédiatement après le discours du président ukrainien sur son souhait de hâter l'adhésion de son pays à l'Otan, saisi l'occasion pour proposer de stationner, pour des raisons sécuritaires, leurs troupes dans la région. Lors de la réunion de la Commission Otan-Ukraine de jeudi, les ministres de la Défense ont « rappelé qu'ils sont déterminés à continuer à œuvrer ensemble dans le but d'appuyer la réforme des secteurs de la sécurité et de la défense de l'Ukraine ». Le communiqué diffusé à l'issue de la rencontre ajoute : « Les ministres ont en outre réaffirmé que la gestion des conséquences des réformes des secteurs de la défense et de la sécurité en Ukraine conserve toute son importance. » Décrypté, ce dernier passage explique, entre autres, que l'Otan supportera toutes les conséquences militaires que subira l'Ukraine dans son ambition de la rejoindre comme membre à part entière. Fidèles à leur logique, les USA de George Bush, par l'intermédiaire de l'Organisation transatlantique, continuent dans leur stratégie « d'encerclement » de la région du Caucase et de celle de la Méditerranée. Il faut bien reconnaître que l'effondrement de l'ex-URSS, et les difficultés internes de l'actuelle Fédération de Russie ont laissé le champ libre aux Américains et leurs alliés de l'Otan pour se replacer dans toute la région du Caucase et ailleurs. C'est pourquoi il n'est pas dit que la Russie cédera facilement du terrain sur la question ukrainienne. Il s'agit du dernier rempart avant les frontières russes.