Au moment où les opérateurs de l'industrie pharmaceutique nationaux s'engagent pleinement dans la vision politique économique du gouvernement, celle d'atteindre les 70% de la production locale de médicaments d'ici à 2015, de nouvelles mesures de ce même gouvernement viennent freiner cet élan à travers la loi de finances 2014. Il s'agit de la suppression de l'exonération de la TVA aux intrants et matières premières entrant dans la production nationale de médicaments. Une mesure qui ne concerne pas, par contre, les médicaments importés pour la revente en l'état. Les articles de la loi 13-08 du 30 décembre 2013 abrogent carrément cet avantage concédé aux producteurs, consacré par l'article 42 du code des taxes sur le chiffre d'affaires. Une disposition qui pénalise sérieusement les producteurs qui sont désormais contraints de «payer au préalable cette taxe, au moment de l'entrée de leurs intrants importés sur le territoire national, une mesure qui ne touche pas, bien sûr, les importateurs de médicaments sous forme de produits finis», relève un producteur qui estime qu'il s'agit d'une mesure qui touchera directement à la trésorerie des producteurs nationaux qui sont déjà soumis au régime de la fixation directe, par les pouvoirs publics, de leurs prix, au niveau de la production comme de la distribution. «Les producteurs sont donc aujourd'hui appelés à préfinancer le Trésor public et bénéficier par la suite d'un remboursement direct des crédits de cette taxe, subis en amont», lit-on dans l'exposé des motifs liés au code des taxes sur le chiffre d'affaires. «L'objectif ciblé est simplement celui de soulager les services fiscaux des contraintes de la gestion des autorisations de franchise de TVA, quitte, pour cela, à choisir la solution de facilité en faisant peser un poids financier très lourd pour les producteurs», estime le docteur Kerrar, président de l'UNOP. Et de signaler : «Dans la mesure où les médicaments importés sous forme de produits finis et destinés à la revente directe sur le marché national ne sont pas concernés par cette contrainte, nous sommes bel et bien en présence d'une mesure qui favorise clairement le recours à l'importation, qui nous discrimine en tant que producteurs et qui, de ce point de vue, contredit la lettre et l'esprit des déclarations des pouvoirs publics censées encourager le développement de la production nationale de médicaments.» Il estime que d'autres solutions existent, qui permettraient de simplifier le travail de l'administration et celui des producteurs, tout en conservant l'avantage octroyé par le code des TCA. «Nous proposons qu'à la place des décisions individuelles et ponctuelles données pour chaque opération, il soit mis en place un système fondé sur des décisions d'autorisations globales et pluriannuelles ; ceci, dans la pratique, est une mesure pouvant entrer dans le cadre de la simple lutte contre les excès de la gestion bureaucratique de l'économie nationale», a-t-il indiqué. Pour Nabil Mellah, producteur national, il aurait été judicieux, avant de prendre cette mesure que les autorités publiques en discutent avec les principaux concernés, à savoir les industriels. «Encore une fois, des décisions sont prises sans concertation, en mettant à mal les pharmaciens industriels», regrette-t-il. Il est anormal que les importateurs de produits finis n'aient pas à payer cette TVA, tandis que l'industriel, lui, doit le faire et attendre ensuite de se faire rembourser… «L'opérateur est considéré comme coupable jusqu'à preuve du contraire : les bons payent donc pour les mauvais. Le soutien à la production nationale prônée par les pouvoirs publics doit se traduire par des preuves, et non pas par des contre-preuves, à l'exemple de cette mesure non concertée», a-t-il déploré. Pour les représentants du Syndicat algérien de l'industrie pharmaceutique (SAIP) et l'Association nationale des producteurs de produits pharmaceutiques (ANPP), cette nouvelle décision pénalise sérieusement le producteur algérien qui était déjà soumis à une pratique bureaucratique pour l'obtention de cette franchise. Aujourd'hui, la situation se complique davantage. «Cette nouvelle mesure aura un impact négatif sur la trésorerie de l'entreprise qui engendrera d'autres difficultés financières. Ce qui va nous asphyxier», ont estimé M. Chibila du SAIP et M. Morsly de l'ANPP.