Lamri Kaouane est un comédien sétifien, réputé pour sa facilité d'élocution et sa maîtrise du jeu théâtral. Rencontré quelques minutes avant la générale de sa pièce Heure zéro, le comédien se confie à nous avec toute la modestie qu'on lui connaît. - Vous venez de signer une nouvelle pièce théâtrale intitulée Heure zéro, dont la générale s'est déroulée la semaine dernière au TNA. D'où vous viennent cette fougue et cette énergie pour l'écriture comique ?
Effectivement, je viens de signer mon dernier produit intitulé Heure zéro. Une pièce théâtrale où le rire est omniprésent. Ce spectacle entre dans la continuité de mes travaux. Je ne pourrai jamais me séparer du rire. C'est souvent dans la tragédie que naît le rire. Je pense que ce qui prime dans un monologue ou encore un spectacle donné, c'est la teneur et la dimension du texte. Je demeure convaincu que le texte se doit d'être à la fois engagé et drôle. Le rire reste pour moi un excellent remède pour briser certains tabous et dire certaines vérités. J'ai pour habitude d'aborder des thèmes sociaux assez percutants. Je les rends plus digestes en faisant appel au rire sans retenue. Le style comique n'est pas le but, mais un moyen pour véhiculer un message.
- Cette fois-ci, vous ne montez pas sur scène, mais vous conviez plutôt deux comédiens de talent à rendre compte de votre texte...
Je suis l'auteur de cette pièce théâtrale, mais la réalisation a été confiée au jeune Faouzi Ben Brahim. Les comédiens Mohamed Seghir Bendaoud et El Hani Mahfoud sont talentueux. J'ai eu à travailler avec eux dans le passé. Mohamed Bendaoud m'a accompagné dans Café Théâtre, de Ziani Cherif Ayad. C'est un garçon discipliné et intelligent. Pour sa part, Hani Mahfoud cumule une carrière riche de 25 ans. C'est un comédien reconnu par ses pairs. La scène n'a aucun secret pour lui.
- Vous abordez d'une façon détournée dans Heure zéro un thème d'une cuisante actualité, à savoir les rapports du couple et le divorce...
Mes textes sont toujours exhumés du social. J'ai mis huit mois pour écrire cette présente pièce. Elle a été montée en un mois et demi grâce au soutien du palais de la culture Moufdi Zakaria, du ministère de la Culture et du Théâtre national d'Alger. Il s'agit de l'histoire de deux hommes qui se retrouvent un soir dans un bar, suite à une dispute conjugale. Ils quittent le domicile tous deux à minuit. Mohamed Bendaoud, dans le rôle de Karim, décide de se rendre dans un bar pour oublier le mal occasionné à sa jeune épouse. Il a oublié de lui offrir une rose à l'occasion de la fête internationale des amoureux, la Saint-Valentin. El Hani Mahfoud, dans le rôle de Hamoudi, lui s'est disputé avec son épouse à cause de l'argent. Elle lui demande chaque jour que Dieu fait de lui donner de l'argent pour honorer les fêtes et les visites familiales. Pris d'une colère sans pareille, au lieu de se rendre dans un café, il se retrouve dans un bar. Si Karim a une vision plutôt cool de la femme, Hamoudi voit en elle une matérialiste. Une sonnerie de téléphone et des pas de talons de femmes viennent déranger l'ordre établi. Quand ces pas deviennent plus insistants, les deux hommes se disputent à cause de cet amour impossible. Dans Heure zéro, nous sommes face à un temps où il n'y a pas de retard. Le message que je veux véhiculer est clair et précis à la fois. Si un homme quelconque n'arrive plus à s'entendre avec sa femme, suite à une altercation ou autre, qu'il ne dise plus qu'il trouvera mieux ailleurs. Sa femme restera sa compagne et la mère de ses enfants. Il faut préserver le foyer.
- Dans la plupart de vos textes, vous ne convoquez jamais l'imaginaire...
Tous mes textes sont tirés de la réalité. Il faut dire que la société regorge de thèmes intéressants. Je puiserai dans l'imaginaire le jour où je ne trouverai plus rien à raconter. Et là, ce n'est pas demain la veille que je le ferai. Tous mes spectacles sont des clins d'œil. Tenez, pour Heure zéro, j'ai dressé des sèche-linge à défaut de tables. J'ai voulu ainsi démontrer que le linge sale se lave en famille.
- Votre démarche de travailler dans un cadre indépendant gêne quelque peu la diffusion de vos créations...
Je travaille, en effet, dans un cadre indépendant. Je suis le fondateur de la coopérative Anis de Sétif. J'écris et je monte des spectacles. Certains artistes me sollicitent même pour leur écrire des textes. J'aime la diffusion. Pour mon dernier one man show intitulé 100% radjla, je suis fier de dire que j'ai donné 1032 spectacles. Nous avons un sérieux problème de programmation en Algérie. Un produit fini ne trouve pas d'espace pour la diffusion. J'essaye d'activer du mieux que je peux, mais cela n'est pas toujours facile. Il faut savoir que j'ai financé la plupart de mes spectacles. Ce sacrifice est indispensable pour ma création.
- Etes-vous sur un autre projet d'écriture ?
J'ai beaucoup de projets. Je compte présenter un nouveau texte café khaïma intitulé Ness Oua Djoussour. J'ai un autre texte politique se rapportant à la Palestine. Par ailleurs, je tiens à souligner que la pièce Heure zéro sera jouée le 4 mars à Koléa et le 27 mars à Sétif. Nous avons d'autres dates pour l'étranger dont nous attendons la confirmation. Nous comptons également valider dans les prochains jours un échange culturel avec la commune de Stent, à Paris.