L'Algérie est parmi les premiers pays au monde à avoir développé le GPL (gaz de pétrole liquéfié) comme carburant. Introduit dans les années 1980 comme source énergétique alternative plus économique et surtout moins polluante, Sirghaz aura été, cependant, une expérience qui n'aura pas été jusqu'au bout, puisque la grande majorité de notre parc véhicules continue de rouler à l'essence, notamment au gasoil qui cause d'énormes dégâts au patrimoine écologique. C'est le grand paradoxe d'un pays gros producteur de gaz qui ne semble pas prendre toute l'importance de ses atouts et potentialités au moment où un peu partout dans le monde on se mobilise pour une adaptation sans heurts aux mutations vertigineuses que connaît le secteur de l'automobile. Des ouvertures vers un progrès inimaginable jusque-là que le challenge Bibendum, organisé par la firme Michelin, a bien mis en relief à l'occasion de sa 8e édition abritée la semaine dernière par Paris, sous forme d'un espace privilégié de rencontres, d'échanges et de débats où les experts du monde entier, en particulier ceux des nations avancées, sont venus exposer les travaux de leurs réflexions et recherches pour essayer de répondre à trois préoccupations de l'heure, à savoir le défi énergétique pour le transport routier de demain, les technologies avancées au service d'une mobilité routière de plus en plus urbaine, la technologie et la sécurité routière. Quelque 2500 participants représentant une centaine d'organismes (industries, organisations non gouvernementales, institutions...) et plus de 500 journalistes venus des quatre coins de la planète ont été, trois jours durant, ainsi confrontés aux dernières inventions et performances appliquées à ce que les initiés appellent avec une évidente connaissance du sujet « la voiture propre ». En fait, l'implication des nombreux acteurs dans le champ de la recherche a pour but de montrer quelle est aujourd'hui la panoplie des solutions techniques qui permettront dans les 25 années à venir au milliard et demi de véhicules en circulation dans le monde de continuer à favoriser développement économique et liberté de déplacement sans être une source de nuisances insupportables pour les sociétés dans lesquelles nous vivons, et de conflits d'approvisionnements énergétiques. Pour le désormais unique patron de Michelin, Michel Rollier, qui en sa qualité de co-gérant a pris la tête du groupe suite à la tragique disparition de Edouard Michelin - le manager reconnu qui a donné toute l'impulsion au challenge Bibendum-, « il n'y a pas de solution unique, mais une diversité de solutions qu'il convient de développer dans le cadre de synergies fortes entre chercheurs, industriels, utilisateurs et législateurs ». Dans cette optique, le défi majeur demeure donc une « mobilité routière anticipant les contraintes environnementales et énergétiques croissantes ». Autrement dit, expliquera Jacques Barrot, vice-président de la commission européenne des transports, « la mobilité du XXIe siècle ne peut se concevoir en dehors des exigences conjointes du développement économique et d'un haut niveau de protection de l'environnement ». On a senti tout au long de cette rencontre tout l'intérêt que porte l'institution européenne à l'avenir de l'automobile dans sa triple dimension économique, financière et écologique. Surtout son souci permanent de concevoir l'engin roulant du futur dans un contexte d'indépendance totale vis-à-vis de l'énergie fossile. L'Europe se prépare, il faut le dire, dès maintenant aux changements fondamentaux qui vont intervenir dans un secteur aussi influent que celui de l'automobile pour ne pas être prise au dépourvu. C'est en tout cas l'idée qu'a affirmée M. Barrot en disant « être favorable à une réflexion sur la définition de standard européen de biocarburant ». Pour ce dernier, « les solutions industrielles à grandes échelles ne seront pas développées sans la garantie d'une interopérabilité et sans la possibilité de faire son plein vert n'importe où en Europe. Avec le concours actif du Parlement européen, nous pourrons réfléchir à la mise en place d'un standard commun entre tous les acteurs de cette chaîne de l'énergie depuis l'agriculteur jusqu'aux pétroliers et distributeurs ». A ce propos, il y a lieu de noter que la filière mondiale du GPL était présente dans toute sa diversité dans ce challenge, avec notamment la présentation de véhicules conçus au GPL à la pointe de la technologie. Si le Japon reste un leader incontesté dans ce domaine, les concurrents européens commencent à pointer le nez. Cela pour dire que ce carburant alternatif, qui porte le nom de Sirghaz chez nous, est considéré par les grandes nations de ce monde comme l'option propre la plus économique et la plus disponible. Pourquoi l'Algérie, pays producteur de gaz de surcroît, se fait-elle très timidement à cette énergie alors qu'ailleurs on n'hésite pas un instant à l'utiliser en allant la chercher de très loin parfois ? On aurait aimé voir un officiel algérien venir à cette manifestation internationale, reconnue comme l'événement n°1 dans la promotion de la mobilité routière durable, pour expliquer le pourquoi des réticences algériennes. En tout état de cause, les quelques spécialistes avec lesquels nous avons discutés trouvent que c'est un gâchis tout en comprenant que le problème des équipements techniques ne sont pas aussi simples. Par ailleurs, si on a développé toute une panoplie de biocarburants qui « marchent » et qui deviennent de plus en plus accessibles comme les carburants synthétiques conçus à base de gaz naturel (GTL), de charbon (CTL) ou de la biomasse (BTL), les moteurs à combustion interne (MCI) ne cessent de s'améliorer. Mais ces MCI devront faire face à la concurrence croissante des moteurs électriques (hybrides) qui ont soulevé une grande curiosité à Paris. La voiture de demain sera-t-elle entièrement électrique ? Beaucoup le pensent... Il reste que l'automobile est un produit économique au sens le plus large dans lequel la part des pneumatiques est loin d'être négligeable. Sur ce plan, on parle aussi du pneu vert qui sera déterminant pour la sécurité des usagers sachant que l'objectif des Européens est de réduire de plus de la moitié le nombre des accidentés de la route d'ici 2010. Pour le patron de Michelin qui compte visiter l'Algérie en 2007, la production pneumatique, c'est aussi l'usine d'Alger qui produit des pneus pour poids lourds. Notre pays, au demeurant, figure parmi les cinq marchés ciblés par la firme française, en l'occurrence la Turquie, l'Arabie Saoudite, le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Algérie. M. Rollier s'est dit très satisfait de la reprise de l'usine après plus de 10 ans d'arrêt. « On passe à la deuxième phase, nous dit-il, qui consiste à la satisfaction de la demande locale avant de songer à l'exportation. »