Le puissant patron de l'Ente Nazionale Idrocarburi (ENI) se serait bien passé de la nouvelle condamnation qu'un tribunal italien lui a infligée pour sa gestion passée du groupe d'électricité Ente Nazionale per l'Energia Elettrica (ENEL). Rome De notre correspondante Paolo Scaroni est tenu pour responsable des conséquences néfastes sur la santé des habitants de la localité de Rovigo. Selon les juges italiens, l'administrateur délégué de l'ENI aurait dû mettre en place des mesures à même d'empêcher la centrale thermoélectrique de Porto Tolle (nord-est de l'Italie) de polluer l'environnement immédiat. Selon l'accusation, les émanations provenant de la centrale ont provoqué des pathologies respiratoires lourdes chez les enfants des familles riveraines. M. Scaroni avait dirigé le groupe ENEL entre 2002 et 2005 et était donc premier responsable des programmes de limitation de la pollution. La condamnation prévoit également l'inéligibilité pour une période de cinq ans de toute fonction publique de M. Scaroni, qui s'est dit «tout à fait étranger à cette affaire» et a annoncé vouloir faire appel. En Italie, les condamnés à de la prison ne sont incarcérés qu'une fois le jugement devenu définitif, c'est-à-dire après les pourvois en appel et en cassation. Ce n'est pas la première fois que Paolo Scaroni est passible de la prison. En 1996, il avait été condamné dans le cadre de l'opération Mani Pulite à un an et quatre mois de prison, pour «corruption», dans l'affaire de la construction d'une autre centrale électrique à Brindisi, dans le sud du pays. Il avait évité la prison car la peine, selon la loi italienne, ne justifiait pas son incarcération. Alors qu'il attendait sa confirmation, dans les prochains jours, à la tête du groupe pétrolier, Paolo Scaroni se voit condamné pour sa responsabilité, aux yeux des juges, dans la pollution de l'environnement des localités vénitiennes où l'ENEL a construit, dans les années 1980, la centrale qui devait produire plus de 8% des besoins en énergie électrique de la péninsule. Interpellé sur cette condamnation, le président du Conseil italien, Matteo Renzi, a affirmé «respecter toutes les sentences de la magistrature». Le Premier ministre italien devra désigner, dans les prochains jours, les dirigeants des principaux groupes et entreprises étatiques, dont l'ENI. Ce verdict historique vise à introduire en Italie le principe «pollueur-payeur». Les géants énergétiques, même ceux où l'Etat est actionnaire majoritaire, ne seront plus à l'abri de fortes sanctions s'ils n'appliquent pas une politique d'assainissement et de préservation de l'environnement rigoureuse et à long terme. Les administrations locales, les associations de défense de l'environnement, de la faune et de la flore n'hésitent plus à se constituer partie civile pour faire valoir le droit des habitants à vivre dans un milieu à l'abri de la pollution de l'air. Les juges du tribunal de Rovigo ont condamné Paolo Scaroni et un autre ancien dirigeant de l'ENEL à payer une indemnisation de 430 000 euros.