Le retard est «habituel» depuis 2003. Il varie selon les régions, les établissements et les enseignants. La révision des programmes s'impose. Le retard dans l'achèvement des programmes scolaires est devenu une tradition dans l'école algérienne. Cette année encore, les cours des classes de terminale ne seront pas achevés. A quelques jours de la date prévue pour l'arrêt des cours (fin avril), le retard est estimé par le Conseil des lycées d'Algérie (CLA) entre 30 et 40% pour les terminales. Quant aux autres niveaux (1re et 2e années du secondaire), les cours réellement étudiés ont atteint à peine 50%, toujours d'après la même source. Le retard est estimé entre un et deux mois de cours. Ce constat est identique à celui établi par les parents d'élèves. Ali Benzina, président de l'Organisation nationale des parents d'élèves, évoque un retard qui varie entre 30 et 40%, tous niveaux et paliers confondus. Ce constat a été confirmé par l'Union nationale du personnel de l'éducation et de la formation (Unpef) et par le Syndicat national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Snapest). Néanmoins, ces deux syndicats soulignent que le retard est «courant», il varie selon les régions, établissements et enseignants. C'est un retard «léger», qualifie Meziane Meriane, secrétaire général du Snapest, qui n'écarte cependant pas que «dans certaines wilayas les programmes n'ont pas été terminés». Le retard est-il dû à la grève qu'a connue le secteur durant les premier et deuxième trimestres ? «Cette situation n'est pas exceptionnelle. Chaque année, on assiste au même phénomène et le retard dans la réalisation des programmes persiste depuis 2003, année de la mise en application de la réforme éducative. Il n'y a pas de différence d'une année à une autre», explique Idir Achour, porte-parole du CLA. Même dans le cas où l'année scolaire se déroule normalement, ce problème subsiste, affirme Idir Achour. De leur côté, l'Unpef et le Snapest, deux syndicats ayant participé au mouvement, soutiennent que la grève n'est pas à l'origine de ce retard dans la mesure où les cours perdus ont été rattrapés. «Les établissements ont ouvert leur portes aux élèves. Mais les absences étaient récurrentes», dénonce Messaoud Amraoui, chargé de communication de l'Unpef, qui déplore le manque d'assiduité chez les élèves des classes de terminale, notamment durant le troisième trimestre. «Même lorsqu'il n'y a pas eu grève, le programme n'est jamais étudié à 100%», rappelle M. Amraoui. Le taux de réalisation des cours pour cette année est estimé par l'Unpef entre 85 et 95%.Du moins pour les établissements où ce syndicat est présent. Toutefois, ce syndicaliste reconnaît que les retards touchent tous les paliers, notamment les classes de 3e année moyenne, et ce, en raison de la surcharge des programmes. «C'est aux élèves et à leurs parents d'assumer la responsabilité du retard dû à l'absentéisme», déclare le chargé de communication de l'Unpef, en notant que les parents ne s'impliquent pas toujours dans la surveillance de la conduite de leurs enfants, notamment leur assiduité. Déserteurs Il convient de rappeler que dès que leur inscription au bac est confirmée, certains élèves désertent le lycée. Des professeurs se retrouvent, durant le troisième trimestre, avec des classes pratiquement vides. L'impact de cette pratique est destructeur pour l'avenir scolaire de l'élève. Quand ces élèves obtiennent le bac, «la plupart d'entre eux redoublent en première année universitaire», met en garde M. Amraoui. M. Benzina énumère la grève des enseignants suivie de celle des élèves et rappelle que la participation des enseignants à la campagne électorale a causé des désagréments énormes aux élèves. Pour toutes ces raisons, terminer le programme scolaire est «impossible». Les parents d'élèves réfutent les accusations des enseignants concernant l'absentéisme de leurs enfants. «Ce sont les enseignants qui ont poussé les élèves à demander un seuil pour les révisions des cours concernés par les épreuves du bac et du BEM ainsi qu'une deuxième session. Et ce, pour cacher leur niveau réel (le niveau des enseignants, ndlr).» Du point de vue pédagogique, «il y a des cours prérequis qui nécessitent un enchaînement». Fiche de synthèse contre seuil de cours Leur suppression cause des difficultés pour le cursus scolaire des élèves qui seront certainement confrontés à des difficultés d'assimilation une fois passés à un niveau supérieur. «Mais le problème ne se pose pas que pour les leçons distinctes. Il reste que tous les vides, notamment lorsqu'ils sont accumulés, deviennent un obstacle pour le développement dans le cursus scolaire de l'enfant», explique Fatima Benamer-Belkacem, docteur en didactique des langues étrangères à l'université de Béjaïa. Cette ancienne inspectrice appelle à l'allégement des programmes : «Ce sont ces situations (surcharge des programmes et des horaires) qui font fuir l'élève de l'école.» Pour sa part, l'Unpef appelle à l'évaluation des candidats au baccalauréat en s'appuyant sur les «fiches de synthèse». De l'avis de ce syndicaliste, ces fiches aideront à instaurer la rigueur et l'assiduité en milieu scolaire. Elles permettront également de rétablir la relation de respect entre l'enseignant et son élève. En plus des obstacles dus aux grèves et à la surcharge des programmes, le porte-parole du CLA dénonce «l'ambiguïté qui règne sur l'orientation du système éducatif, qui n'est toujours pas tranché entre la préspécialisation et l'enseignement général». C'est l'enseignement général qui domine.