Israël peut avoir peur, la République islamique d'Iran dispose aujourd'hui, non seulement d'un embryon de capacité nucléaire, mais aussi du moyen de frapper à partir de son territoire l'ensemble de l'Etat hébreu. Avec le test réussi, la semaine dernière, du missile Shahab-3, d'une portée de 1470 km, c'est Israël en entier qui entre sous le parapluie balistique iranien. Du coup, Tel-Aviv brandit la menace d'une attaque préventive et en appelle à ses alliés américains. Justement, le général Aharon Zeevi Farkash, chef des renseignements militaires israéliens, avait estimé, le 6 juillet dernier, que l'Iran pourrait disposer de l'arme nucléaire d'ici à 2007, d'où la nécessité de recourir à tous les moyens pour contrer cette menace. « L'Iran n'a pas l'intention de stopper son programme nucléaire. Et s'il réussit à le poursuivre jusqu'au printemps 2005, alors dans les deux années suivantes, il obtiendra l'arme atomique », avait-il déclaré. « Qu'Israël tire un seul missile contre la centrale nucléaire de Bouchehr (sud-ouest de l'Iran, ndlr), et il peut oublier à jamais le centre nucléaire de Dimona, où il produit et garde ses armes atomiques, et c'est Israël qui sera responsable des conséquences terrifiantes de tels actes », a mis en garde le général Mohammad Baqer Zolqadr, un des chefs des Pasdaran, l'armée idéologique du régime iranien, à qui ont été remis le programme des missiles iranien. Interrogé sur la participation de l'armée au nucléaire iranien, l'amiral Ali Chamkhani avait répondu « oui et non » : « Non parce que les activités nucléaires iraniennes sont pacifiques », « oui parce que l'Iran prend des dispositions face à une menace nucléaire militaire ». « Notre seule intervention dans le domaine nucléaire, c'est la protection nucléaire », avait-il dit dans une formulation équivoque semblant signifier une contre-attaque nucléaire. « Si on mène une opération militaire contre nous, nous ne pouvons pas rester sans rien faire, alors nous investissons dans la protection nucléaire », avait-il déclaré. Le mot est lancé, l'Iran joue à fond le jeu de la dissuasion nucléaire, en mettant sous la menace du feu atomique, non seulement l'Etat hébreu, mais aussi les troupes US stationnées en Afghanistan, en Irak et autour de la mer Caspienne, ainsi que les bâtiments croisant au large du golfe arabo-persique. A ce sujet, Téhéran développe autant les missiles terre-terre, que terre-mer, afin de « contrôler » l'accès au golfe. La riposte Israélienne pourrait revêtir l'aspect d'une réédition de l'attaque lancée par Tsahal contre les installations atomiques Irakiennes au début des années 1980. Le 7 juin 1981 à 15h55, un F-15 et un F-16 de l'armée de l'air israélienne, décollent de la base aérienne d'Etzion. Les appareils volent à basse altitude à travers les espaces aériens jordanien, saoudien et irakien. Il est 17 h 35, lorsqu'ils aperçoivent le dôme de la centrale Tammuz près d'Osirak, la défense aérienne irakienne est prise par surprise et ne put réagir. En une minute vingt secondes, la centrale tombait en ruine. Aujourd'hui, une telle opération serait difficile à réaliser tant les systèmes de défense anti-aériens ont gagné en performances. L'Iran dispose d'une panoplie d'interception beaucoup plus perfectionnée que celle dont disposait l'Irak il y a vingt ans. Les missiles S/100 et S/300 sont particulièrement craints par les pilotes les plus chevronnés, d'autant que l'effet de surprise ne peut, cette fois, être utilisé. Israël vient, de son côté, tout juste de fignoler les tests de son missile Arrow II, capable en théorie de prendre en chasse et d'abattre une quinzaine de missiles simultanément. Les conséquences d'une attaque et d'une contre-attaque représenteront un véritable désastre écologique et humain pour les deux pays. Si la centrale de Dimona se trouve dans une région peu habitée d'Israël, celle de Bouchehr se situe dans une zone peuplée et d'une valeur historique et écologique très importante.