Il est difficile de croire que le Front de libération nationale ait pris, seul, l'initiative d'élaborer un projet de révision constitutionnelle. Il est tout aussi impossible d'imaginer que ce projet, tel qu'il a été concocté, soit entièrement l'œuvre du FLN. Derrière cette initiative, il y aurait un seul homme : Abdelaziz Bouteflika. Il est également évident que des constitutionnalistes proches du Président aient mis la main à la pâte. Partant, il est fort probable que le chef de l'Etat agrée, sinon la totalité, du moins les principaux amendements proposés par la fameuse « commission de révision constitutionnelle », installée au siège de l'ancien parti unique. Il s'agirait, en résumé, de la suppression de la clause limitant le nombre de mandats, l'élargissement des pouvoirs présidentiels, la création d'un poste de vice-président de la République et la révision (suppression ?) du pouvoir de censure sur le gouvernement. Première cible : l'article 74 de la Constitution adoptée en novembre 1996 en vertu duquel la durée du mandat présidentiel est fixée à cinq ans et le président de la République n'est rééligible qu'une seule fois. L'Algérie ne risque-t-elle pas d'être en net recul par rapport même à la Constitution de 1989, en permettant au chef de l'Etat une rééligibilité indéfinie ? Les architectes du projet ne voient pas les choses sous cet angle. « La limitation d'un mandat du président de la République (...) même si elle est perçue par certains comme étant une évolution importante qui permet l'alternance pacifique au pouvoir, il reste que d'autres estiment que les exigences de la stabilité politique et institutionnelle, notamment dans les pays qui sont récemment sortis d'une crise multiforme, imposent de ne mettre aucun lien sur le renouvellement des mandats », lit-on dans le document publié par le FLN. Les tenants de la révision constitutionnelle ont également émis des propositions allant dans le sens du renforcement des pouvoirs présidentiels. « Le pouvoir exécutif doit être concentré dans une seule main », ont-ils estimé, sans donner plus de détails. On parle aussi de la création d'un poste ou de plusieurs postes de vice-présidents. « Il est possible de donner au président de la République la possibilité de nommer un vice-président ou un groupe de vice-présidents. Il a aussi l'entière prérogative de les charger de missions qu'il aura à fixer », est-il suggéré. Quelles seront les missions de vice-président ? « En cas de vacance du poste de président de la République pour tout motif énoncé dans la Constitution, c'est au vice-président d'assumer la fonction de président de l'Etat, mais il n'a pas le droit, dans ce cas de figure, de se présenter à l'élection présidentielle », est-il précisé dans le même document. Cependant, le vice-président de la République (ou les vices-présidents), le Premier ministre et les ministres seraient, suivant ce projet, considérés comme des collaborateurs du président de la République. Partant, ils seraient responsables devant le chef de l'Etat qui disposerait, dans ce cas, du droit de mettre fin à leurs fonctions. A bien lire ce texte, on croit comprendre que les initiateurs du projet entendent mettre fin à la fonction de chef de gouvernement au profit d'un Premier ministre qui tiendrait ses pouvoirs exclusivement du Président. Dans le chapitre lié à la relation entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, il est suggéré la révision –ou la suppression– du pouvoir de censure sur le gouvernement. « Il faut revoir la motion de censure énoncée dans l'actuelle Constitution (...), la question du retrait de confiance de n'importe quel ministre ou du Premier ministre lui-même ne doit pas être liée à la déclaration de politique générale. Il faut supprimer toute allusion à cette question dans la révision constitutionnelle proposée. » Comment le Parlement pourra-t-il, le cas échéant, contrôler l'action de l'Exécutif ? « Les amendements proposés dans ce domaine aspirent à renforcer le rôle du Parlement dans les domaines du contrôle sur les membres de l'Exécutif », est-il indiqué. Quant aux moyens traditionnels de contrôle, ils sont maintenus dans le document du FLN. Il s'agit des question écrites et orales, des interpellations et des commissions d'enquête.