Il faisait chaud en cette journée du dimanche 1er juillet 1956. Au centre-ville de Constantine, les gens cherchaient de la fraîcheur en fin d'après-midi de ce week end particulier. Au Casino municipal situé près de l'ex-avenue du 11 Novembre (actuelle avenue du 20 août 1955), une foule importante a investi aussi bien la terrasse que l'intérieur de la brasserie. L'ambiance est détendue, avec un orchestre qui jouait une musique légère, malgré les craintes d'un attentat qui pouvait survenir à tout moment. Déjà, il y a deux semaines, une catastrophe avait été évitée de justesse. Selon les faits rapportés par la Dépêche de Constantine, trois individus avaient été arrêtés. L'un d'eux avait été trouvé en possession d'une grenade qu'il avouait avoir l'intention de lancer sur la terrasse du Casino. Depuis, et après les attentats de la rue Caraman (actuelle rue Didouche Mourad), les mesures de sécurité ont été renforcées dans la ville, avec des ruelles barrées de fils de fer et de nombreuses patrouilles. Les abords du Casino, notamment la terrasse et l'entrée de l'avenue du 11 Novembre, sont devenus des lieux hautement surveillés. Malgré tout, à 18h30 de ce dimanche, alors que la brasserie était pleine de monde et toutes les tables occupées, une grenade fut lancée à partir du trottoir situé juste en face. L'engin qui tomba devant l'entrée de la brasserie explosa aussitôt. La déflagration violente provoqua une panique indescriptible. De nombreuses personnes avaient été atteintes par les éclats de l'engin. Selon le bilan des services de la police, rapporté par la Dépêche de Constantine du lundi 2 juillet 1956, l'attentat avait causé la mort de trois personnes, et une trentaine de blessés, dont trois éléments du CRS. Cet attentat est le plus violent depuis celui commis dans les mêmes lieux le 30 avril 1955. C'est une action qui a aussi ébranlé l'administration coloniale. Pour preuve, juste après l'attentat, l'inspecteur général de l'administration française, Maurice Papon, s'est déplacé sur les lieux pour s'enquérir de la situation, en compagnie du Général Noiret, commandant la Division et les troupes de l'Est algérien, ainsi le maire de la ville Eugène Valle, et le commissaire central de la police Pinelli. Vers 19h, une importante opération avait été déclenchée par la police dans le quartier de Aouinet El Foul et l'avenue Bienfait à la recherche des auteurs de cet attentat. L'importance de ce dernier réside dans le fait qu'il est survenu huit mois après l'arrestation des principaux membres de l'organisation du FLN à Constantine, dont Aouati Mostefa, Zaâmouche Amor, Benabbes Saïd, et Mentouri Belkacem, qui seront rejoints par Benmeliek Abderrahmene en mai 1956. Tous ont été condamnés à mort. Mais les actions des groupes de fidayines n'ont jamais cessé à Constantine. La ville, organisée en zone autonome, à l'instar d'Alger, avec Messaoud Boudjeriou comme responsable général, connaîtra encore avec les commandos de choc, une guerre plus longue et plus intense.