Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé hier la fin de la mission Serval, opération militaire lancée par la France le 11 janvier 2013 au Mali pour arrêter la progression vers Bamako des islamistes armés après l'effondrement de l'armée malienne. Cette annonce ne signifie pas pour autant la fin de la présence militaire française au Sahel puisque Serval a été remplacée au pied levé par l'opération Barkhane, vocable qui désigne une dune en forme de croissant allongé dans le sens du vent. Mais contrairement aux objectifs qui avaient été assignés à Serval, cette nouvelle opération — qui devrait bénéficier de près de 3000 hommes — aura pour principale mission la lutte contre le terrorisme dans l'ensemble du Sahel. Le ministre français de la Défense, qui était l'invité de l'émission «Le grand rendez-vous» Europe 1-Le Monde-iTélé, a expliqué ce changement par «le souhait du président Hollande» de procéder à une réorganisation des forces françaises au Sahel, avec «l'opération Barkhane dont l'objectif est essentiellement du contre-terrorisme». Serval «a été menée à bien, avec une grande efficacité (…) et avec l'élimination de beaucoup de terroristes et beaucoup de stocks d'armes repris. Maintenant il y a le souci, pour nous et pour les pays de la zone, de veiller à ce qu'il n'y ait pas de recrudescence du terrorisme car il y a toujours des risques majeurs de développement de djihadistes dans la zone qui va de la Corne de l'Afrique à la Guinée-Bissau», a ajouté M. Le Drian. Maintenant combien de temps prendra l'opération Barkhane ? Très longtemps visiblement. Le ministre français de la Défense a, en tout cas, joué franc jeu en reconnaissant qu'il s'agissait bien d'une «présence durable» au Sahel. Concernant les aspects techniques, celle-ci devrait se mettre en place dans les tous prochains jours et sera menée en partenariat avec cinq pays de la zone sahélo-saharienne. Barkhane comptera 20 hélicoptères, 200 véhicules blindés, 10 avions de transport tactique et stratégique, 6 avions de chasse et 3 drones pour avoir «la réactivité nécessaire». Un diplomate occidental accrédité à Alger a confié qu'en plus des pays du Sahel, les forces françaises de Barkhane travailleront de concert avec l'Africom, le commandement de l'armée américaine pour l'Afrique. L'information se tient dans la mesure où François Hollande, lors d'une visite effectuée en février dernier à Washington, aurait accepté l'idée, proposée par Barack Obama, d'une «syndication» des moyens militaires français et américains sur le terrain africain. En s'inscrivant sur le long terme, la France n'est-elle pas sur le point d'endosser l'uniforme de gendarme de l'Afrique ? Pour Paris, ce n'est pas du tout le cas. La question serait donc purement sécuritaire. «Le but, c'est d'empêcher que ce que j'appelle l'autoroute de tous les trafics ne devienne un lieu de passage permanent de reconstitution des groupes djihadistes entre la Libye et l'océan Atlantique, ce qui entraînerait des conséquences graves pour notre sécurité. C'est notre sécurité qui est en jeu !», a insisté M. Le Drian. Soit. Au Mali, les militaires français devraient voir leur marge de manœuvre croître avec l'accord de défense qui sera signé ce mercredi entre Français et Maliens à Bamako. Celui-ci devrait permettre aux unités de l'opération Barkhane (un millier d'hommes seront stationnés au Mali) de disposer d'une base stratégique dans le nord du Mali. La France a, rappelle-t-on, signé des accords de défense avec la majorité des pays d'Afrique francophone qui lui ont permis de procéder à un maillage sécuritaire serré de l'Afrique de l'Ouest où elle compte de nombreux intérêts économiques. C'est le cas, par exemple, au nord du Niger où la firme Areva exploite deux importantes mines d'uranium. L'un d'elle est d'ailleurs convoitée par les Chinois. Le président Hollande devrait effectuer cette semaine un déplacement dans la région pour expliquer dans le détail et en personne à ses homologues africains les implications de «la nouvelle politique sécuritaire de la France pour le Sahel».