Mory Kanté a prié le ciel pour qu'il puisse jouer dimanche à Timgad. Sa soirée prévue la veille a été gâchée par la pluie qui a causé des frayeurs, y compris durant la journée de dimanche en continuant à arroser la région et à faire planer le doute jusqu'à la dernière minute. Sa prière a été finalement exaucée : ouvrir cette quatrième soirée du festival sans qu'il y ait encombrement au programme, puisque Naïma Ababsa et Hyam Younès ont déclaré forfait. Le griot malio-guinéen s'est vite emparé de la scène, entouré de ses 9 musiciens multinationaux qui résument le cosmopolitisme du groupe. La nouvelle formule acoustique de Mory Kanté, forte d'un flûtiste américain, d'un guitariste français, de deux choristes et d'un duo de percussions envoûtant, a su montrer la maturité de sa musique, puisée des réserves africaines, et son retour aux sources de l'identité première dégagée des ersatz de la world music des majors. Birya, dédiée aux femmes (africaines), suivie d'une longue impro qui reprend le rythme des premiers esclaves noirs de l'Amérique, ces deux compositions prouvent l'engagement politique de cet ambassadeur de la FAO qui sait bien aller à la rencontre de son public (même si celui de Timgad n'en est pas vraiment un) et chauffer les gradins notamment en terminant avec son tube planétaire, Yeke Yeke. Avant de partir, le maître de la kora a formulé le souhait de revenir encore en Algérie et de prier le wali de jumeler Timgad et sa ville natale Kaïssidougou. La suite de la soirée a été confiée à une troupe folklorique des Hauts-Plateaux ensuite à la troupe Aïssaoua El Ousfan de Constantine qui ont été franchement rébarbatifs pour nous pousser encore à nous interroger sur les critères de choix de l'ONCI. La soirée a sombré dans l'ennui jusqu'à ce moment fort de l'apparition sur scène de Yasmine Hadj Nacer, Abderrahmane Djalti et Cheb Anouar qui ont repris une chanson de Hadj El Hachemi Guerouabi et véhiculé une pensée profonde pour le cheikh qui se bat en ce moment contre la mort. Les trois chanteurs reviendront respectivement sur scène pour réchauffer le public qui commençait à ressentir le froid de la nuit. Anouar réussira même à mettre de l'électricité grâce aux rythmes ternaires de l'Ouest et l'appui de l'orchestre recruté à Batna qui mérite un tableau d'honneur.