De nombreuses questions primordiales demeurent encore confuses, voire évacuées, de cet avant-projet de loi. Soumise pour enrichissement aux partenaires sociaux, la première mouture de l'avant-projet de loi sanitaire, issu des travaux des Assises nationales organisées en juin 2014, risque de ne pas faire l'unanimité au sein de la corporation. Si certaines recommandations ont connu un grand écho et ont été reprises dans leur globalité par la commission chargée de rédiger ce texte, d'autres sont restées lettre morte malgré l'insistance des syndicats, les associations et autres participants sur le caractère prioritaire de certains points importants. Il s'agit principalement de l'abrogation de l'activité complémentaire maintenue par cette nouvelle loi, la révision ou l'abrogation du service civil pour les médecins spécialistes de santé publique en mettant en place des mesures incitatives et la la nouvelle carte sanitaire non soumise à discussion lors des assises. «Toutes nos propositions semblent être ignorées et pourtant lors des ateliers, c'est l'écrasante majorité des participants qui a voté pour l'abrogation de l'activité complémentaire. Nous ne comprenons pas cet décision», s'interroge le Dr Yousfi, président du Syndicat national des médecins spécialistes de santé publique (SNPSSP) qui n'exclut pas d'autres dysfonctionnements dans la prise en charge des malades avec le maintien de cette activité lucrative. «Le système de santé s'est gravement fragilisé depuis l'introduction de cette activité complémentaire. Nous avons exigé son abrogation lors des assises nationales et cela a été retenu à l'unanimité par tous les présents lors des travaux en ateliers. Mais elle reste maintenue et autorisée les week-ends. Il est clair que les malades seront détournés pour être pris en charge les week-ends», a-t-il regretté et de signaler que l'avant-projet prévoit aussi d'instaurer l'activité complémentaire au sein de l'hôpital sans préciser les modalités de son intronisation. «Chose qui ne peut être possible sans une réelle politique de santé, un système de santé publique fort et un conseil de l' Ordre des médecins fort». Le texte préconise donc l'activité complémentaire au sein de l'Etablissement public de santé sur la base d'un contrat interne entre l'établissement et l'équipe soignante concernée. «Elle est assurée par les professionnels de santé ayant la qualité de fonctionnaire et exerçant leurs activités au sein de l'établissement concerné et la durée ne peut excéder 20% de l'activité hebdomadaire du service concerné. Elle peut être exercée par des professionnels de santé ayant le statut contractuel, les professionnels de nationalité étrangère et les professionnels installés à titre privé sur la base d'un contrat définissant les obligations des deux parties et prévoyant les sanctions en cas de manquement d'obligations de ces professionnels» (Art 276). Quant au service civil, le Dr Yousfi signale que cet avant- projet prévoit un durcissement du dispositif alors que nous avons proposé sa révivion en mettant en place des mesures incitatives. «Le nouveau texte prévoit une décentralisation et de laisser les gestionnaires des établissements organiser les mutations et dégager des postes budgétaires. Ce qui rendra les choses encore plus complexes. Le texte fixe par ailleurs, la durée du service à trois années quelle que soit la région du pays. C'est la même période pour les régions du Sud et du Centre, alors que le délai était modulable». Une décision qui risque de susciter la colère des médecins résidants qui ont gelé, durant des semaines en 2012, les activités médicales à travers un mouvement de grève pour exiger l'amélioration des conditions de travail La région sanitaire définie par la nouvelle carte sanitaire est également un point de discorde puisqu'il n'a pas fait l'objet de discussions lors des assises nationales. Un point qui a été évoqué avec les syndicats en décembre 2013, mais qui n'avait pas fait l'unanimité. «Nous avons émis des réserves et nous avons demandé à ce que le projet soit soumis à discussion lors des assises. Chose qui n'a pas été faite», signale le Dr Yousfi. A noter que l'avant- projet prévoit par contre la mise en place des régions sanitaires dans un délai d'un (01) an, à compter de la date de la publication de la présente loi au Journal officiel. De nombreuses questions primordiales pour la promotion et la protection de la santé de la population demeurent encore confuses, voire évacuées, de cet avant-projet de loi, telles que la tarification des actes médicaux et chirurgicaux encore obsolètes, le financement des établissements de santé, le plan cancer, etc. Que devient le système de contractualisation conçu pour répondre à toutes ces exigences ? Des propositions émaneront, sans doute, des différents partenaires du secteur pourvu qu'elles soient prises en compte.