Les milices islamistes refusent de céder l'autorité à la Chambre des députés. Des milices armées, proches des islamistes de l'opération Fajr Libya ont progressivement chassé tous les responsables du gouvernement libyen de leurs bureaux à Tripoli, sans qu'aucune autorité publique ait la capacité de les en empêcher. A l'image de l'aéroport international de Tripoli que les miliciens pro-islamistes ont incendié dès qu'elles s'en sont emparé, les mêmes forces ont chassé des ministères les responsables qui sont restés pour assurer le service public. Ainsi, le strict minimum d'institutions et de départements ministériels, faisant office d'administration publique, sont partis en fumée et la capitale libyenne vit, depuis, dans le chaos total. Le gouvernement de Abdallah Al Thani, qui vient de présenter sa démission, a choisi, comme le Parlement, de s'installer à Tobrouk, près de la frontière égyptienne. Tobrouk est désormais la capitale administrative de la Libye. Sur le plan diplomatique, le Conseil de sécurité a adopté, mercredi dernier, à l'unanimité, une résolution pour «étendre l'embargo aux armes et au gel des avoirs financiers des personnes et entités qui se livrent ou apportent un appui à des actes de sabotage contre la paix, la stabilité ou la sécurité en Libye, ou qui entravent la réussite de sa transition politique». Tout en reconnaissant l'autorité de la Chambre des députés, le Conseil de sécurité et les puissances occidentales ont appelé à «un engagement constructif en faveur du dialogue politique facilité par l'ONU». Mais, ce n'est pas encore opérationnel. Les milices islamistes refusent de céder l'autorité à la Chambre des députés. L'opération Fajr Libya a été menée de concert par les forces pro-islamistes des Boucliers de la Libye et d'Ançar Charia, afin de déloger les forces proches des libéraux de l'aéroport de Tripoli. Il s'agit des forces alliées à Misrata contre celles de Zentan. Cependant, une fois l'aéroport, ou ce qui en reste, tombé entre les mains des islamistes, le langage n'était pas uniforme au sein de ces forces conquérantes. Divers communiqués, aux contenus divergents, prétendent tous parler au nom de l'opération Fajr Libya. Ainsi, avant-hier, un premier communiqué, signé par le Conseil de la choura de Tripoli, déclare «l'acceptation par Fajr Libya de l'autorité de la Chambre des députés, élue le 25 juin dernier». «Nous exigeons juste l'application stricte de la petite Constitution, avec une passation des pouvoirs en règle», a déclaré Mohamed Hadia, le porte-parole de Fajr Libya dans une allocution transmise par la télé de Misrata. Le responsable misrati s'est même engagé à «laisser la Chambre des députés travailler sans la moindre contrainte et protéger ses locaux». Hier, le groupe Ançar Charia, partie prenante de Fajr Libya, a rejeté le contenu de cette déclaration et annoncé «son opposition à la démocratie occidentale et son attachement à l'application de la charia islamique sur tout le territoire libyen». Le communiqué a rappelé à ses «alliés» que «le peuple libyen n'a pas dégagé Mouammar El Gueddafi pour instaurer la démocratie mais, plutôt, la législation de Dieu». Deux contenus différents et des lendemains encore sombres pour la Libye, qui, semble-t-il ne connaîtra pas la sérénité de sitôt.