C'est ce lundi que devraient prendre fin les dernières tentatives de «réanimation» du Haut Fourneau HF N°2 dont la torche a disparu du ciel de la ville d'El Hadjar depuis plus de 60 jours. Après l'échec de la mission russe, ArcelorMittal Algérie (AMA) a sollicité l'expertise des espagnols dans l'espoir de voir le cœur de l'usine sidérurgique se remettre à battre. A pied d'œuvre depuis leur arrivée, il y a près d'une quinzaine de jours, ces experts espagnols qui ont fait leurs preuves, parvenant à prolonger la vie de plusieurs HF aussi vieux et souffrants que celui d'El Hadjar, ont déployé le très efficace procédé de carottage/injection de gaz naturel à l'intérieur du HF. «Pour permettre la communication à l'intérieur du bloc du HF, ils ont percé un trou de 3,8 m de profondeur au niveau de la fente de coulées. Ils ont par la suite utilisé une lance pour injecter le gaz naturel. En principe, dans les quelques jours à venir, les résultats de l'intervention de l'équipe espagnole seront connus», expliquent des ingénieurs métallurgistes d'El Hadjar ayant assisté les hôtes ibériques. En attendant, les 5300 travailleurs retiennent toujours leur souffle, le redémarrage de l'unité phare du complexe est plus que vital pour l'entreprise. D'autant que les prolongements des retombées de l'arrêt du HF N°2, ont pris une dimension fort inquiétante, impactant lourdement la production dans les laminoirs à froid et à chaud. Pour tenter de les apaiser, un tant soit peu, ArcelorMittal a opté pour le processing, c'est-à-dire, la transformation des produits semi-finis en produits finis à fortes valeurs ajoutées. Ont ainsi été importées, dans un premier temps, de Pologne 20 000 tonnes de billettes en plus de 30 000 tonnes de brames dont l'arrivage est annoncé pour ce mercredi 17 septembre. L'objectif majeur étant de couvrir une partie des charges fixes telles que les salaires, loyers, électricité, téléphone... Le déploiement d'un plan de rigueur est l'autre moyen palliatif dont s'est servie la direction générale aux fins de rationnaliser les dépenses. Il en est ainsi de la mise en congé payé de milliers de travailleurs : «De juillet à août derniers, pas moins de 60 000 jours de congé ont été consommés par les salariés de l'entreprise avec une moyenne de 13 jours/ travailleur. La mesure a touché l'ensemble des effectifs (quelque 5300 personnes)», a-t-on appris auprès de sources syndicales. Aussi, il a été décidé de la réduction de 1/3 les capacités de transport du personnel, via des jumelages (transports groupés). ArcelorMittal a, par ailleurs, renoncé à toutes activités de sous-traitance, laquelle pèse plus de 30% des dépenses de l'entreprise. Toujours dans le cadre du plan d'austérité, la direction générale a procédé au transfert d'une partie des effectifs de la production du cycle posté au cycle normal et ce, en vue de réduire les charges liées aux primes de poste. Cette cure d'amaigrissement que subit, pour la énième fois, le géant national de l'acier parviendra-t-elle à apaiser la crise, sans précédent, dans laquelle il sombre depuis des mois, voire des années. En témoigne : à fin août, l'usine d'El Hadjar a réalisé une production d'à peine 200 000 tonnes de produits sidérurgiques sur le un million de tonnes, objectif arrêté pour l'exercice 2014. Quelques années auparavant, l'entreprise réalisait, à la même période, entre 580 000 et 600 000 tonnes. Ses parts de marché domestique qui se montaient à 20 et 30% ont sensiblement baissé, moins de 10%. Idem pour les exportations qui sont quasi nulles. Le chiffre d'affaires s'en retrouve amputé de près de 70% par rapport à 2012. En termes d'emplois, la situation n'est pas moins dramatique : aucun nouveau recrutement n'a été enregistré depuis ces trois dernières années, assurent nos sources syndicales. Pis, l'entreprise est dans l'incapacité de remplacer les travailleurs partis à la retraite, au moins 50 départs/mois. Le prix de vente de ferphos en hausse Lorsque l'Etat a officiellement repris, le 5 octobre 2013, le contrôle de l'entreprise conformément à la formule 51/49 prévu dans l'article 76 de la Loi de finances complémentaire (LFC) de 2009, y était également incluses les deux mines de Boukhadra et de Ouenza, soit ArcelorMittal Tébessa. Si pour l'usine d'El Hadjar tout a été finalisé au plan juridique, notarial et administratif, ArcelorMittal Tébessa, demeure, quant à elle, à ce jour sous le contrôle, comme par le passé, du Groupe indien ArcelorMittal à hauteur de 70% et de Ferphos Group à 30%. Autrement dit, les statuts d'ArcelorMittal Tébessa sont restés tels quels. A cela une raison : un sérieux différend algéro-algérien, déplore le député Smain Kouadria. Ferphos Group espérait, toujours selon lui, à ce que les 21 % de parts cédés par le partenaire étranger lui soient accordés par l'Etat, vu que le Groupe de fer et phosphates détenait déjà 30% du capital d'ArcelorMittal Tébessa. La nouvelle reconfiguration du capital ; 49% revenant à ArcelorMittal, 21 % au Groupe public Sider et 30% à Ferphos, ne semble être du gout de cette dernière, explique l'ex patron du syndicat d'ArcelorMittal Annaba. «Dans l'impossibilité de s'opposer ou de rejeter une décision émanant du plus haut sommet de l'Etat, Ferphos Group n'a pas trouvé mieux que de décider de revoir à la hausse ses prix de vente du minerai de fer. De 30 dollars, le prix de revient à la tonne livrée au complexe sidérurgique risque de passer au double. D'intenses pourparlers à ce sujet sont actuellement en cours entre les trois partenaires», indique Smaïn Kouadria qui se demande si ce différend n'avait pas pour véritable origine ce qui s'apparente à un conflit d'intérêts, né de l'émigration de la filière des mines, il y plus d'un an, du ministère de l'Energie vers celui de l'Industrie.