Des pères et des mères de disparus durant les années noires du terrorisme se sont rassemblés, hier, sur la place du 1er Mai, à Alger, pour réclamer la vérité sur le sort de leurs enfants. Neuf ans après l'adoption de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, les familles de disparus sont toujours en quête de vérité et de justice. Hier encore, des parents de disparus durant les années noires du terrorisme se sont rassemblés sur la place du 1er Mai, à Alger. Ils ont scandé des slogans hostiles aux détenteurs du pouvoir et ont dénoncé la charte de réconciliation nationale. «Patients et debout, pour nos enfants, nous ne nous tairons jamais», scandaient les manifestants. Ces familles ont appelé le gouvernement à respecter les droits des victimes en ouvrant des enquêtes pour faire la lumière sur le sort de toutes les personnes disparues et en poursuivant et jugeant les responsables de ces violations. Encadrés par les forces de l'ordre, les manifestants ont tenu leur rassemblement dans le calme. Ils brandissaient les portraits de leur proches ainsi que des banderoles et des pancartes où l'on pouvait lire «Où sont nos enfants ?», «Barakat du pouvoir des généraux et des mafias», «Ulac smah, ulac (pas de pardon)», «Pouvoir assassin»... Les initiateurs de cette action attendent des réponses à leurs questions : «Nous voulons savoir où sont les corps de nos enfants. Si les autorités nous avaient donné les corps de nos proches, nous aurions fait notre deuil, mais tant que nous ignorons ce qui est arrivé à nos enfants nous occuperons la rue.» Les manifestants promettent de ne pas baisser les bras jusqu'à ce que la lumière soit faite sur le sort des disparus. Ce rassemblement coïncide avec le référendum sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale. «Neuf ans après, nous sommes toujours à la case de départ, le dossier des disparus de la tragédie nationale n'est pas clos puisque le pouvoir n'a pas satisfait nos revendications : l'identification des lieux de détention des disparus encore vivants et leur libération, l'identification des fosses communes et des corps qui s'y trouvent à travers les tests ADN», affirme Mme Dutour, porte-parole de cette organisation, et affiche la détermination des familles à aller jusqu'au bout de leurs convictions. «Nous sommes là et notre détermination n'est pas affaiblie. Nous occuperons la rue chaque semaine et à chaque événement, jusqu'à ce que l'on nous rende nos enfants. N'est-il pas légitime pour une maman de savoir où est son fils et de faire le deuil ?», s'est interrogé une mère dont l'enfant a disparu en 1995. Cette dernière critique en outre les textes d'application de la charte, qui infligent une véritable torture morale aux familles de disparus. En effet, selon Mme Dutour, pour obtenir l'indemnisation proposée par la charte, les familles doivent solliciter un jugement de décès auprès d'un tribunal sans qu'aucune enquête n'ait été menée pour élucider le sort réservé à leurs proches.