L'envoyé spécial de l'ONU en Libye, Bernardino Leon, s'est dit satisfait des débuts, lundi dernier, de la réunion de Ghadamès entre des députés représentant la majorité du Parlement, qui se réunissent à Tobrouk, et les autres députés qui boycottent ces réunions. Tunis De notre correspondant La tenue de la réunion de Ghadamès, en elle-même, est un indicateur de bonne volonté en pareille phase de la crise traversée par La Libye. Les premiers échanges directs ont montré que tous les députés présents considèrent que la Chambre des députés est l'unique autorité légitime en Libye et que toute solution passe par l'obtention d'un cessez-le-feu entre les belligérants», précise le responsable onusien, qui annonce une autre réunion pour la semaine prochaine afin de continuer à discuter un ordre du jour de deux points : la fin du boycottage de la Chambre des députés et la sortie des milices de Tripoli pour permettre au gouvernement de Abdallah Thani de retrouver ses bureaux dans la capitale libyenne. Outre le représentant de l'ONU, la première réunion de Ghadamès s'est tenue en présence du représentant de Malte et de l'envoyé spécial britannique, Jonathan Powell. Côté libyen, le conseil municipal de la ville de Ghadamès n'a assisté qu'à la séance inaugurale, avant de quitter la salle de réunion où 15 membres de la Chambre des députés, dirigés par le vice-président de la Chambre, Mohamed Cheaïb, ont discuté durant plus de trois heures avec une dizaine de députés, parmi ceux qui boycottent les réunions du Parlement à Tobrouk. C'est le délégué spécial italien pour la Libye, Guéossi Potchino Grimaldi, qui a relaté ces faits à partir d'Abu Dhabi. Il est actuellement aux Emirats arabes unis pour coordonner avec l'Algérie et les Emirats la tenue, à Alger dans les jours à venir, d'un round séparé de Dialogue national libyen, se voulant sans exclusion. La tenue de la réunion de Ghedames a provoqué une levée de boucliers à Tripoli et Misrata, parmi les opposants à la réconciliation nationale. Ainsi, Abderrahmane Souihli, Ali Bouzaâkouk et Abderraouf Mennaï, les trois députés, leaders de la fronde contre la tenue à Tobrouk des réunions de la Chambre des députés, se sont dressés contre toute issue négociée à partir de Ghadamès. Bilan mitigé L'homme fort de Misrata et président du parti Union pour la patrie (UPP), Abderrahmane Souihli, a même averti que «tout accord signé à Ghadamès n'engage pas Fajr Libya». Il conteste la légitimité même de la Chambre des députés. «La sortie de la crise en Libye passe par des élections anticipées et l'installation d'un nouveau gouvernement intérimaire.» L'actuelle Chambre des députés a, selon lui, perdu sa légitimité après avoir déclaré «terroriste» les partisans de l'opération Fajr Libya. Ces «renégats (en référence aux députés présents à Tobrouk) ont perdu la confiance du peuple et il faut qu'ils rendent le tablier», ajoute Souihli. Il est toutefois à souligner que d'autres députés, boycottant également Tobrouk, ne partagent pas l'avis de Souihli. Ainsi, l'ancien ministre, Mustapha Bouchagour, valorise l'apport de la réunion. «Elle va permettre de baisser l'effervescence dans la rue, provoquée par certaines décisions inappropriées de la Chambre des députés», pense ce député de Tripoli, proche pourtant des Frères musulmans. Bouchagour n'a toutefois pas fait le déplacement de Ghadamès. Par contre, le député de Misrata, Fathi Bacha Agha, a participé à la rencontre et il pense que «c'est un pas important sur la voie de la réconciliation nationale en Libye car elle va permettre de couper avec l'hégémonie de l'un ou l'autre des bords», dit-il optimiste. Côté belligérants de la scène politique, la Chambre des députés a publié un communiqué de soutien aux efforts de réconciliation à Ghadamès. Dans ce même ordre d'idée, l'état-major des armées a annoncé l'arrêt des opérations militaires, à l'exception des ripostes en cas d'attaques visant ses troupes. La Banque centrale libyenne a également exprimé son soutien à une telle démarche. Par contre, un communiqué de Fajr Libya a condamné la réunion de Ghadamès. «Les révolutionnaires vont continuer leur marche pour la libération de la Libye des renégats», est-il notamment dit dans un communiqué publié avant-hier, qui a provoqué la colère de certains députés de Misrata, partie prenante de Fajr Libya, mais «n'adhérant pas à cette thèse». Du côté des notables religieux, c'est également la division. Le mufti Sadok Ghariani a appelé à suspendre le dialogue de Ghadamès, alors que le Haut comité des savants musulmans a exprimé son soutien à tout processus de réconciliation. La situation est toujours confuse en Libye.