La diplomatie américaine s'active au Proche-Orient. Elle devient plus intense après que d'autres pays se soient épuisés, pour avoir cru peut-être qu'ils pouvaient aspirer à un rôle dans un conflit où les Etats-Unis et Israël ont toujours réduit le nombre de partenaires. Cela rappelle d'autres guerres, marquées elles aussi par la même approche. C'était le cas en 1982, mais trop évident en 1996. Les Etats-Unis, cela est évident, sont alors intervenus comme s'il s'agissait de mettre un terme à un certain type de dégât. Ils ont eux aussi une opinion à gérer, mais Israël s'est retrouvé avec un rapport accablant de l'ONU établissant avec précision le caractère délibéré d'un bombardement d'un bâtiment de l'ONU où des Libanais ont trouvé refuge. Le bombardement en question a fait 100 morts, tous des civils désarmés. Cette fois aussi, l'opinion israélienne est particulièrement instable, des villes se vident, des réservations sont annulées, et la peur s'installe. De plus, et c'est un ministre israélien qui l'a dit avec beaucoup d'amertume, l'armée israélienne s'est montrée incapable de donner le moindre avantage aux dirigeants pour les placer en position de force dans une éventuelle négociation. Les choses, comme le disaient les Israéliens, n'ont donc pas changé, ou si, mais pas dans le sens par eux espéré, puisque le Hezbollah qu'ils voulaient éliminer se retrouve dans une position de force sans égale. C'est dans un tel contexte que la secrétaire d'Etat américaine est revenue hier au Proche-Orient, la première visite ayant eu lieu il y a tout juste six jours. Fait important, cette visite a été annoncée vendredi par le président George W. Bush qui recevait le Premier ministre britannique Tony Blair. Sans parler de mission de la dernière chance, Mme Condoleezza Rice a déclaré qu'elle s'apprêtait à avoir une série de discussions « assez intenses » au Proche-Orient, mais qu'elle était encouragée par des progrès dans plusieurs domaines. Mme Rice s'attend à des discussions « assez intenses (qui ne seront) pas faciles, (nécessitant) des concessions mutuelles, avec les responsables en Israël », a-t-elle dit à des journalistes à bord de l'avion la transportant depuis la Malaisie en Israël. « Nous ne sommes pas en train de fixer de délai, mais évidemment, comme nous voulons une fin prochaine à la violence, il est important que nous obtenions un accord » sur des points essentiels, a ajouté Mme Rice. Les Etats-Unis ont jusqu'ici rejeté les appels à un cessez-le-feu immédiat dans cette guerre imposée au Liban par Israël estimant que les conditions n'étaient pas réunies pour qu'un tel cessez-le-feu soit durable. « Je suppose, parce que nous avons des gens travaillant à la fois avec les Israéliens et les Libanais, qu'il y aura des opportunités de concessions des deux côtés », a poursuivi Mme Rice. « Il s'agit de décisions vraiment difficiles et émotionnelles (...) » des deux côtés, a-t-elle poursuivi, tout en ajoutant : « Je pense qu'il y a beaucoup d'éléments qui commencent à s'arranger. » La responsable américaine a également salué un plan du Premier ministre libanais Fouad Siniora pour une solution du conflit avec Israël. « Il s'agit très certainement d'un pas positif », a-t-elle estimé, en référence à la décision unanime du cabinet y compris donc deux ministres du Hezbollah, d'appuyer le plan de M. Siniora. Le plan Siniora, comme on tend à l'appeler, fait siennes les revendications du Hezbollah, comme la libération des détenus et l'évacuation de tous les territoires libanais, y compris donc la zone dite des fermes de Chabaâ. Concernant le premier point, une précision d'une extrême importance a été apportée hier par le président du Parlement libanais, et elle tend à démentir la propagande israélienne. Nabih Berri, chargé par le Hezbollah de négocier l'échange de prisonniers avec Israël, a confirmé pour la première fois que cet échange concernait uniquement les détenus libanais en Israël. « S'ils (les Israéliens) le veulent, en une semaine, en quelques jours (..), le Liban est prêt à commencer l'opération d'échange de détenus libanais et les corps (de combattants) pour le retour des deux soldats israéliens », a déclaré M. Berri. Cela est évident qu'il ne s'agit que d'une étape d'un plan à l'égard duquel se méfie le Hezbollah, rejetant encore ce qu'il qualifie des conditions humiliantes. Ce plan se poursuivra demain par des discussions à l'Onu, sur la composition et le mandat d'une force internationale dépêchée dans le sud du Liban. Le Conseil de sécurité de l'Onu devra ensuite adopter une résolution « fixant le cadre clair d'une cessation des hostilités de manière urgente et mandatant la force multinationale », selon M. Bush qui a ajouté que Mme Rice « travaillera avec les dirigeants d'Israël et du Liban pour saisir l'occasion de parvenir à une paix et une stabilité durables pour les deux pays ». Mais si un échéancier semble au moins esquissé, un haut responsable israélien a refusé hier de fixer une date butoir à l'agression contre le Liban, lancée le 12 juillet. Ce proche collaborateur du Premier ministre Ehud Olmert a également réaffirmé qu'Israël était favorable au déploiement d'une force internationale au Liban-Sud. Ce responsable a également déclaré que cette force devait se déployer « le long de la frontière entre le Liban et la Syrie », une proposition qui n'est pas nouvelle pour avoir été avancée mercredi dernier par le chef de l'Etat français. Reste maintenant à connaître la consistance réelle du plan américain, à moins qu'il ne consiste une nouvelle fois qu'à reconduire le statu quo. Ce qui semble dépassé par la convergence au sein des plus hautes autorités libanaises quant à la restauration de la souveraineté. Avec cette autre précision selon laquelle il est hors de question que l'armée libanaise tienne le rôle de garde-frontière pour Israël.