On pourrait croire à un cycle tournant ou à la mobilité des résistants irakiens, mais cela réduirait considérablement leur importance car, la multiplication des points de résistance et leur persistance attestent du contraire. Autrement dit, il est bien difficile de donner une identité aux résistants et une localisation ainsi qu'une appartenance quelconques. Même les quelques revendications paraissant sur certains sites ne sont pas toujours crédibles et ne sont donc pas prises au sérieux. C'est tout le mal qu'éprouve l'armée américaine et dans son sillage, la coalition pour identifier ceux qui la combattent et éventuellement les neutraliser. C'est donc le recours aux grands moyens qui ne sont pas toujours les plus efficaces, mais certainement les plus meurtriers comme l'indique le détail des différents bilans des attaques américaines. Et hier, l'armée américaine pilonnait la ville de Falloujah à l'ouest de Baghdad, connue pour être le point de départ de la résistance irakienne dès le mois de mai 2003. 15 personnes ont été tuées et 20 autres blessées par des tirs d'artillerie et des raids de l'aviation américaine hier matin. « Jusqu'à présent, nous avons enterré 15 personnes, parmi lesquelles un chauffeur, deux infirmiers et cinq blessés transportés dans une ambulance qui a été touchée par un obus », a affirmé Falah Abdallah, un fossoyeur au cimetière de la ville. Les hommes qui se trouvaient au cimetière contenaient mal leur colère, rapporte-t-on de sources concordantes. Certains creusaient des tombes et d'autres lavaient les corps. Les morts étaient transportés en pick-up jusqu'au cimetière. « Nous avons reçu 20 blessés, la plupart sont sérieusement atteints », a affirmé un médecin de l'hôpital général de Falloujah. Selon des témoignages concordants, des chars ont ouvert le feu, vers 4h, heure locales (00h00 GMT), sur deux quartiers du nord de la ville pendant près de deux heures, avant qu'un avion de combat ne mène un raid sur le quartier d'Al Chourta. Une maison a été complètement détruite par un missile et deux autres endommagées. Un autre missile tiré par un avion de chasse américain sur une voiture civile qui circulait sur l'autoroute à l'ouest de Falloujah a causé la mort des quatre passagers. Trois passants ont été également blessés dans cette attaque, selon un médecin de l'hôpital. Dans sa version des faits, la Force multinationale (FMN) a indiqué avoir « conduit avec succès un raid contre un lieu de réunion des partisans d'Abou Moussab Al-Zarqaoui », un islamiste considéré par les Américains comme l'« ennemi numéro un » en Irak. « Selon les renseignements que nous possédons, les associés de Zarqaoui, responsables de nombreuses attaques terroristes, étaient réunis en ce lieu au moment du raid », affirme le communiqué dont les termes sont en net décalage par rapport aux différents témoignages dont ceux des envoyés spéciaux de la presse occidentale. Ces derniers relèvent par contre que Falloujah, accusée d'abriter des groupes de résistance, est la cible régulière des bombardements américains. Jeudi, 12 Irakiens, dont 2 femmes et 5 enfants, avaient été tués et 9 autres personnes blessées dans un raid aérien américain dans la ville qui visait, selon l'armée, une habitation abritant des résistants. Le tout nouveau secrétaire d'Etat en charge de la sécurité dans le gouvernement de Iyyad Allaoui Kassem Daoud avait affirmé samedi que les forces irakiennes, avec l'appui de la Force multinationale (FMN), combattaient les « terroristes » au nord, au sud et à l'ouest du pays, citant précisément la ville de Falloujah. Mais cette guerre est menée par les Américains, et les terroristes en question, puisque même des responsables irakiens les considèrent ainsi, sont parfois des femmes et des enfants.