Les Américains sont de plus en plus pris dans l'engrenage de la violence. Les attaques, notamment à la roquette, se multiplient en Irak, mettant de plus en plus sur la défensive les forces d'occupation de la coalition qui se croyaient en territoire conquis. En fait, il ne se passe plus de jours où des soldats, singulièrement américains, essuient des attaques, dont certaines revendiquées par un groupe, jusqu'alors inconnu, les «Brigades de la résistance irakienne». Les 150.000 soldats américains, partagés entre des tâches innombrables, entre autres celle d'assurer la sécurité, telle que les opérations de police de proximité, de distribution d'aide humanitaire, de remise en état des pompes à eau, font que l'armée américaine, très dispersée, ne parvient pas effectivement à contrôler, comme sans doute elle le voudrait, un pays aussi étendu que l'Irak. Cela d'autant plus que l'on ne sait pas avec certitude qui se bat contre - ou plutôt qui résiste en Irak à - l'occupation américano-britannique. Que cela soit du fait de civils, de leur propre initiative, des mystérieuses «brigades de la résistance irakiennes», ou, plus vraisemblablement, du fait des débris des partisans de l'ex-président Saddam Hussein, le fait patent est que la coalition est confrontée à une résistance féroce que, sans doute, les stratèges du Pentagone n'ont pas totalement intégrée dans l'après-Saddam Hussein. Cette opposition à l'occupation américano-britannique, minimisée, ou pas du tout prise en compte, pose de plus en plus de problèmes au commandement central américain, Centcom, qui ne semblait pas s'attendre à cette résistance armée, même si, pour le moment, les pertes humaines américaines ne soient pas alarmantes. Ce qui l'est, en revanche, est le fait que la coalition se soit engagée dans ce qui apparaît comme un prélude au bourbier vietnamien. Cela d'autant plus que d'anciens soldats irakiens, toujours privés de salaires, montent au créneau réclamant, aux occupants américano-britanniques, le paiement de leur solde, menaçant de reprendre les armes. Ainsi, une délégation de cinq anciens officiers irakiens a rencontré un officier américain auquel fut remis leur revendication. Leur porte-parole indique: «Si lundi (le 23 juin) à midi les Américains ne trouvent pas une solution appropriée à notre situation tragique, nous reprendrons les armes», ajoutant: «Nous sommes tous des soldats bien entraînés et armés. Nous tendrons des embuscades, lancerons des bombes et nous mènerons même des attentats suicide. Nous n'allons pas nous laisser humilier par les Américains». La coalition, qui est loin d'avoir la situation en main, se prépare à des jours difficiles. De fait, des responsables américains, tout en estimant que ces opérations sont le fait de Saddam Hussein, s'interrogent néanmoins sur les tenants de cette multiplication d'attentats anti-américains. Cependant, faisant l'impasse sur la réalité de l'occupation, un responsable du ministère américain de la Défense est allé jusqu'à dire, mine de rien: «La résistance de ces types augmente, ils continuent de nous gêner, et on se demande ce qui les motive.» Si les Américains ne savent pas pourquoi les Irakiens résistent, on se demande qui va le leur dire et que font-ils dans un pays où, à l'évidence, ils ne sont pas les bienvenus. Si la coalition est occupée, et dans le même temps inquiétée, par la recrudescence des actions de la résistance, elle tente, encore cependant, de percer le mystère entourant les armes de destruction massive de Saddam Hussein, toujours introuvables. Maintenant, les Américains fondent leurs derniers (?) espoirs sur le secrétaire particulier de Saddam Hussein, arrêté lundi dernier. Considéré comme le plus proche collaborateur du président déchu, il est attendu de Abdel Hamid Mahmoud, qu'il leur donne le mot de la fin de l'énigme des ADM. Ce que, du moins, espère Washington, qui estime que Abdel Hamid Mahmoud constitue pour elle une «carte maîtresse» dans la recherche des armes prohibées. Toutefois, demeure le fait que d'autres atouts, tout aussi importants - qu'a été l'arrestation des responsables politiques et scientifiques irakiens - n'ont pas, pour autant, contribué à éclairer la donne de la détention, ou non, par l'Irak d'armes de destruction massive, lesquelles sont non seulement introuvables mais, à l'existence desquelles, seuls les Américains persistent encore à croire.