Un rapport accuse l'agence américaine d'avoir soumis des dizaines de détenus à la torture sans l'autorisation du gouvernement. L'usage de techniques d'interrogatoire «renforcées» par la CIA dans les années 2000 et dénoncées par Barack Obama, comme la torture, n'a pas permis de déjouer des menaces imminentes d'attentats, conclut un extraordinaire rapport du Sénat, immédiatement contesté par l'agence d'espionnage. Dans 20 conclusions implacables pour la CIA, le rapport de 525 pages, expurgé et publié par la commission du renseignement du Sénat, contrôlée par les démocrates, accuse l'agence d'avoir soumis 39 détenus à des techniques brutales pendant plusieurs années, dont certaines n'étaient pas autorisées par l'Exécutif américain et que le Sénat décrit en détails. Barack Obama, qui avait mis fin au programme à son arrivée au pouvoir en janvier 2009, a réitéré que ces méthodes avaient «fortement terni la réputation de l'Amérique dans le monde». Il a salué l'effort de transparence, afin de tourner la page. «La CIA a employé des techniques d'interrogatoire renforcées à répétition pendant des jours et des semaines», décrit le rapport. Les détenus ont été jetés contre les murs, dénudés, placés dans des bains glacés, empêchés de dormir pendant des périodes allant jusqu'à 180 heures. Le détenu Abou Zoubeida, après avoir subi des simulations de noyade à répétition, «avait de la mousse qui sortait de la bouche», quasi-inconscient. Au total, 119 détenus ont été capturés et emprisonnés dans le cadre de ce programme secret de la CIA, dans des sites dits «noirs», dans d'autres pays. L'une de ces prisons secrètes est qualifiée de «donjon». «A aucun moment, les techniques d'interrogatoire renforcées de la CIA n'ont permis de recueillir des renseignements relatifs à des menaces imminentes, tels que des informations concernant d'hypothétiques bombes à retardement, dont beaucoup estimaient qu'elles justifiaient ces techniques», conclut le résumé du rapport. La commission accuse la CIA d'avoir menti, non seulement au grand public mais aussi au Congrès et la Maison-Blanche, sur l'efficacité du programme, notamment en affirmant que ces techniques avaient permis de «sauver des vies». Une assertion répétée hier par la CIA, qui était préparée à la déclassification du rapport et en a rejeté les conclusions.