Panique à bord. Après avoir affiché un optimise béat quand aux capacités du pays à faire face à une chute brutale des prix des hydrocarbures, le gouvernement affiche désormais profil bas. L'équipe de Abdelmalek Sellal revient à plus d'humilité et se range derrière les appels à la prudence, et ne tient plus de discours euphorique adopté jusque-là. Cette nouvelle tendance dans le discours gouvernemental a atteint, hier, son apogée lorsque le ministre de l'Industrie a reconnu que la situation actuelle «exige» des réajustements. La conjoncture actuelle «nous impose de revoir toutes les politiques qui ont été menées jusqu'à maintenant et d'en faire une évaluation avant d'aller concrètement vers la promotion de la production nationale», a en effet indiqué le ministre, invité de l'UGTA. Avant Abdessalem Bouchouareb, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, avait insinué, lors d'une visite à Constantine, que le gouvernement pourrait avoir recours à «une loi de finances complémentaire» si la situation demeure en l'état. Pour donner corps à cette tardive prise de conscience, le gouvernement multiplie les réunions pour tenter de trouver une parade à une baisse des recettes en devises. Une première réunion s'est déjà tenue lundi. Elle a défini les secteurs dans lesquels le gouvernement pourra faire des économies. Une seconde réunion se tiendra aujourd'hui à Alger. Ces affirmations contrastent avec celles affichées, il y a trois jours, par le ministre de l'Habitat. Abdelmadjid Tebboune a en effet assuré, à partir de la ville des Ponts, que la chute des prix du baril ne va pas «compromettre» les projets de logement inscrits dans le plan quinquennal 2014-2019. Discours alarmiste ? Pourtant, il y a tout juste quelques semaines, Abdelmalek Sellal s'est violemment attaqué à ceux qui ont alerté le gouvernement quant à la baisse des prix du pétrole. Il s'en est même pris à ceux qui «nous découragent» avec leur «pessimisme». C'était lors d'une réunion avec les walis. Mais autres temps, autres mœurs, les prévisions des opposants au pouvoir se sont confirmées. Et la seule béquille sur laquelle s'appuie le gouvernement dans ses dépenses, à savoir les hydrocarbures, vacille et risque de chuter dangereusement, risquant ainsi de compromettre tous les desseins du pouvoir. D'habitude très diplomatique dans ses critiques contre les politiques du gouvernement, Mohamed Laksaci a orienté, lors de sa dernière sortie devant les députés, ses salves contre la situation actuelle. Le gouverneur de la Banque d'Algérie met ainsi en garde contre la poursuite de la baisse des prix du pétrole et sa répercussion sur l'économie nationale. De son côté, Mohamed-Seghir Babès, d'habitude laudateur du gouvernement, a changé de tonalité et évoque, lui aussi, une «situation difficile» pour l'économie du pays. Mais pour sauver les meubles, le président du CNES recommande de ne pas «toucher» aux transferts sociaux de sorte que «les couches les plus défavorisées» ne soient pas pénalisées lors d'une éventuelle crise économique liée à la chute des prix du pétrole. Sentant une sorte du feu vert au défaitisme, certains économistes proches du régime se sont eux aussi mis de la partie. Ils osent désormais parler, et sur la chaîne de Télévision publique, des risques qui pèsent sur le pays à cause de la baisse des prix du pétrole. Est-ce une manière de s'attendre au pire ?